8 août 2021, 19ème dimanche "B"

1Roi 19,4-8; Eph 4,30-5,2; Jean 6, 41-51 

H O M É L I E 

          Élie est une figure fascinante de la Bible. Un des grands prophètes, il était un homme d'action encore plus que de paroles. Je ne crois pas que l'Écriture nous rapporte un seul de ses discours. C'était un mystique, un solitaire venu du grand désert oriental. L'Esprit de Dieu le déplaçait constamment d'un endroit à l'autre : la Phénicie, le Mont Horeb, le torrent de Kerit, le palais du roi Achab, le Jourdain... Sa mission était liée à tous les mouvements de l'histoire de son peuple. Et partout c`était par ses actions qu'il parlait.

 

          Il était un aussi un ardent défenseur de Yahvé et était prêt à tuer tous les prêtres de Baal, ces ennemis de Dieu, pour démontrer l'authenticité de sa mission. Dans le Livre des Rois, c'était précisément le récit qui précédait celui que nous avons entendu comme première lecture. Après cela, la reine Jézabel est furieuse et veut le tuer. Alors Élie, ce grand prophète plein d'ardeur, se met à avoir peur et fuit pour sauver sa vie. Il découvre qu'il est un homme comme les autres -- un homme faible, même un peureux. Il fuit au désert et après une journée de marche, il n'en peut plus. Il veut mourir et dit à Dieu (c'est le récit que nous venons de lire): "C'en est assez, Seigneur! Prends ma vie, je ne suis pas meilleur que mes pères!"

          Le désespoir d'Élie n'était pas différent de la situation désespérée qu'avait rencontrée le peuple d'Israël en Égypte, quand Pharaon menaçait de les exterminer. La situation d'Élie résume ce qu'a vécu le Peuple dans le passé; et sa délivrance sera l'écho de la leur. Son pèlerinage devient non pas un voyage vers l'obscurité de la nuit mais vers la lumière du jour. Tout comme Dieu est intervenu pour sauver son peuple de l'esclavage, ainsi intervient-il pour sauver Élie du désespoir. Nous assistons à un mini-Exode.

          C'est la première fois qu'Élie fait l'expérience de sa faiblesse, de sa peur, de son péché. Il reçoit alors de l'Ange de Dieu le pain qui lui permettra de continuer son chemin au désert, vers le mont Horeb, où il rencontrera Dieu. (Il fait, symboliquement, en sens inverse, le chemin parcouru par le Peuple d'Israël durant ses quarante ans au désert, à partir du mont Horeb). Le pain reçu par Élie est évidemment le symbole de l'Eucharistie, tout comme la manne dont parlaient les lectures de dimanche dernier. Autre figure de l'Eucharistie est évidemment ce que Jésus dit dans l'Évangile d'aujourd'hui: "Je suis le pain vivant descendu du ciel."

          Symbole du pèlerinage du peuple d'Israël, son pèlerinage est aussi le prototype du nôtre. Ce n'est pas lorsque nous sommes assurés de nos vertus et de la vérité que nous croyons posséder, que nous faisons l'expérience de Dieu; mais plutôt lorsque tout semble crouler sous nos pieds -- et cela arrive un jour ou l'autre dans toute vie -- lorsque les vertus que nous croyions avoir s'évaporent, lorsque nos vérités sont remises en question, que Dieu commence à agir.

          La première leçon que nous pouvons tirer de ces textes est que nous ne rencontrons pas Dieu et n'entrons pas en relation personnelle avec Lui lorsque nous sommes certains d'être bons, et certainement pas lorsque nous pensons être meilleurs que les autres ou -- encore pire -- lorsque nous sommes prêts à éliminer -- d'une façon ou d'une autre -- ceux que nous considérons les ennemis de Dieu ou les nôtres. Non! Pour entrer en relation personnelle avec Dieu nous devons, comme Élie, découvrir notre faiblesse, notre besoin de guérison, c'est-à-dire de conversion.

         

          Nous pourrons alors recevoir l'Eucharistie comme un pain de vie, un pain qui nous permettra de continuer notre cheminement à travers le désert. Lorsque nous recevons ce pain, nous le faisons non seulement pour renouveler nos forces, mais aussi et surtout pour exprimer notre foi en Jésus qui a dit: "le pain que je donnerai c'est ma chair pour la vie du monde." Faisons de notre communion d'aujourd'hui un tel acte de foi.