8 novembre 2020 – 32ème dimanche "A·

Sg 6, 12-16; 1 Th 4, 13-18; Mt 25, 1-13

Abbaye de Ligugé, France

 

HOMÉLIE

           En ces derniers dimanches de l’année liturgique, les lectures de l’Évangile attirent de plus en plus notre attention sur le retour du Christ et donc aussi sur le moment de la rencontre finale avec le Créateur, qui sera pour chacun de nous le moment de notre mort.  Or, la préoccupation principale de tous ces textes n’est pas la « vie après la mort », mais bien comment nous aurons préparé cette rencontre par la qualité de notre vie ici-bas.  C’est bien le sens de la dernière phrase de l’Évangile que nous venons de lire : « Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l’heure ».  « Veiller » ne signifie pas ici attendre passivement, mais bien vivre les yeux ouverts et attentifs.  Même si cette brève phrase semble arriver comme un cheveu sur la soupe, elle est bien la conclusion logique du récit qui précède. 

 

           Le récit de cette parabole se situe dans le contexte -- bien connu par les auditeurs de Jésus -- d’une noce, selon les coutumes d’Israël, où l’épouse, accompagnée de plusieurs jeunes filles, attendait l’arrivée de l’époux, accompagné lui-même de ses compagnons, pour commencer la fête, avant d’être introduits tous les deux dans la chambre nuptiale. Des dix jeunes filles en question, cinq étaient prévoyantes (ou sages) et avaient emporté de l’huile pour leurs lampes ; et cinq étaient insensées et avaient oublié de le faire.  Pour bien comprendre cette parabole, telle qu’elle nous est rapportée par Matthieu, il faut la mettre en relation avec un autre enseignement de Jésus qu’on retrouve avec la même terminologie en Matthieu.  Il s’agit de l’enseignement concernant la maison bâtie sur le roc ou bâtie sur le sable. « Tout homme qui entend les paroles que je viens de dire – dit Jésus – peut être comparé à un homme sage (ou prévoyant) qui a bâti sa maison sur le roc... Et tout homme qui entend les paroles que je viens de dire et ne les met pas en pratique, peut être comparé à un homme insensé (ou insouciant) qui a bâti sa maison sur le sable... » (Matt. 7, 24-27). Et ce texte était précédé de l’autre texte où Jésus avertit qu’au jour du jugement il dira à ceux qui ont prophétisé en son nom et même chassé les démons en son nom, mais n’ont pas fait la volonté de son Père : « Je ne vous ai jamais connu » (Matt. 7, 21-23) – la même parole qu’il adresse dans notre texte d’aujourd’hui aux jeunes filles insensées.

           L’huile d’olive tenait une très grande place dans l’antiquité biblique, à côté du pain et du vin.  On s’en servait pour préparer la nourriture, ou comme médicament, de même que comme tonifiant esthétique pour améliorer la beauté du corps.  On s’en servait aussi pour faire divers parfums et, bien sûr, comme combustible pour les lampes.  Ici, dans notre parabole, l’huile est le symbole de la fidélité à la parole de Jésus, à son premier commandement, celui de l’amour.  C’est quelque chose que chacun doit vivre.  Ce n’est pas par égoïsme que les vierges sages ne peuvent le partager avec les sottes ;  c’est que personne ne peut le vivre pour les autres.  Chacun doit le faire pour son propre compte.

          

           En définitive, l’enseignement de cette parabole est simple.  Il se résume dans cette simple phrase : « au soir de la vie nous serons jugés sur l’amour ».  Nous serons admis au banquet des noces entre Dieu et l’humanité dans la mesure où nous aurons notre bagage d’amour, dans la mesure où nous aurons mis en pratique durant notre vie ce premier commandement qui comprend tous les autres.  Si nous ne l’avons pas fait, quelles que puissent être les grandes choses que nous aurons faites dans notre vie, y compris nos prières et nos actes de vertu, nous risquons de nous entendre dire : « Dommage, je ne vous connais pas ! ».

           Mais pour ne pas terminer sur ce ton, ne manquons pas de relire le beau texte de la Sagesse que nous avions comme première lecture.  Cette Sagesse -- autre nom du Dieu qui est Amour -- vient à la rencontre de ceux qui la cherchent, de ceux qui l’aiment.  Ces quelques lignes sont la description de la vie contemplative – vie d’union à Dieu dans la Rencontre et dans l’amour – mais une rencontre et un amour qui ne sont pas réels s’ils ne sont incarnés dans la rencontre et l’amour du prochain.

Armand Veilleux