C PÂQUES 03 JEAN 21, 03-14 (17) Chimay : 04.05.2025

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Frères et sœurs, depuis le dimanche de Pâques, il y a un mot qui revient souvent ; c’est le mot “témoin” ; nous le trouvons dans la première lecture : « Quant à nous, nous sommes témoins de tout cela avec l’Esprit Saint que Dieu a donné à ceux qui lui obéissent » (Ac 5,32). Traînés devant le tribunal, les apôtres maintiennent qu’ils sont, eux et l’Esprit Saint, les témoins de la résurrection de Jésus.

Ces témoins n’ont pas manqué de courage. Il leur avait été interdit de parler de Jésus ressuscité. Ils ont continué à le faire ; les brimades et les humiliations n’ont pas réussi à les décourager ; bien au contraire, ils sont repartis « tout joyeux d’avoir été jugés dignes de subir des humiliations pour le nom de Jésus » (Ac 5,41). Tout joyeux, et non pas désireux de se venger.

Comme eux, nous sommes tous appelés et envoyés pour être des témoins du Christ ressuscité ; rien ne doit nous arrêter, même s’il faut ramer à contre-courant. Souvenons-nous que, selon son étymologie grecque, le « martyr » est le « témoin » fidèle, qui ne faiblit pas sous la menace. Dans l’Église primitive, les martyrs sont nombreux. C’est encore plus vrai pour l’Église d’aujourd’hui ; beaucoup se demandent si elle a encore un avenir. C’était déjà le cas pour les disciples après la mort de Jésus. Pierre, déçu d’avoir cru en Jésus, est retourné à la pêche :

il a repris son occupation habituelle, son gagne-pain. Avec ses amis, il avait mis toute son espérance en Jésus. Mais tout est retombé avec la crucifixion et la mort de Jésus. Ils reprennent donc leur métier. Ils deviennent en quelque sorte des non-croyants, des non-pratiquants. Et c’est là que le Seigneur les rejoint. Il se trouve devant des pêcheurs fatigués et déçus de n’avoir rien ramené de toute la nuit.

Alors Jésus leur fait recommencer leur pêche : « Jetez les filets à droite de la barque et vous trouverez » (Jn 21,6). Et là, le résultat dépasse toutes leurs espérances. L’Évangile nous parle de 153 gros poissons. Ce chiffre symbolise tous les peuples de la terre connus à cette époque ; l’Église est appelée à les rassembler pour les conduire au Christ ressuscité qui les invite au repas, à l’Eucharistie. Nous sommes tous appelés pour annoncer cette bonne nouvelle, mais c’est Jésus qui agit dans le cœur de ceux et celles qui l’entendent.

Pierre « se jette à l’eau » pour aller à la rencontre du Ressuscité. C’est toujours la mission des responsables de l’Église de prendre des risques par amour du Christ et de leurs frères. C’était la troisième apparition de Jésus ressuscité à ses apôtres. Mais la pêche miraculeuse est le premier signe de sa puissance au-delà de sa résurrection. L’invitation à manger rappelle bien sûr la Cène aux disciples. Mais c’est par leur foi et par leur amour pour le Maître que s’opère leur transformation d’hommes abîmés en témoins.

Pour eux comme à nous, tout cela demande un amour sans faille à l’égard de Celui qui appelle et envoie. C’est ce qui est demandé à Pierre : « Simon, m’aimes-tu vraiment, plus que ceux-ci ? » (Jn 21,15). Cette question revient trois fois. Nous nous rappelons que Pierre avait renié son Maître trois fois de suite. Il se trouvait donc dans une situation très inconfortable. Mais Jésus va lui offrir de s’en sortir. Pierre va pouvoir lui dire trois fois son amour. Alors Jésus fera de lui le berger de son troupeau. Tous les grands témoins de la foi sont des pécheurs pardonnés, des gens qui ont accueilli la miséricorde de Dieu. Alors, comme Simon, nos vies peuvent devenir des pierres de fondation. Et peut-être, dans la prière, oserons-nous, nous aussi, murmurer au Christ : « Tu sais tout. Tu sais bien que je t’aime » (Jn 21,17).

Ces textes de la Parole de Dieu d’aujourd’hui sont riches et fortement symboliques. Dans l’évangile, il s’agit de nourriture, alors que les Apôtres n’ont rien pris de la nuit. Là, sur la berge, il y a un homme qu’ils ne reconnaissent pas et qui fait cuire du poisson et du pain. Et voilà que cet inconnu leur demande de lui donner à manger, tandis que leurs filets sont restés vides. Étonnant miracle qui n’est pas sans leur rappeler quelque chose qu’ils ont déjà vécu : « Jetez le filet à droite de la barque » (Jn 21,6), leur dit cet homme. « C’est le Seigneur » (Jn 21,7), s’écrie le disciple que Jésus aimait. À quoi, aujourd’hui, reconnaissons-nous le Seigneur ? Et croyons-nous vraiment aux surprises de Dieu dont parlait souvent le pape François ?

La miséricorde du Christ ne connaît pas de limite. C’est vrai pour chacun de nous. Le Christ nous rejoint tous là où nous en sommes pour raviver notre espérance. Pour lui, il n’y a pas de situation désespérée. Aussi comme Pierre, nous sommes invités à “plonger” et à lui faire confiance sur parole. Comme lui, nous sommes envoyés dans ce monde pour témoigner de l’espérance qui nous anime. C’est à tous et à chacun que le Christ ressuscité veut manifester sa miséricorde. Lui-même nous dit qu’il est venu « chercher et sauver ceux qui étaient perdus » (Lc 19,10). Il veut nous associer tous à sa victoire sur la mort et le péché.

La deuxième lecture est extraite de l’Apocalypse de Saint Jean (Ap 5,11-14). C’est un livre un peu déroutant quand on n’en a pas l’habitude ; aujourd’hui, nous avons entendu des paroles de victoire, de triomphe et de louange. Il faut savoir que tout cela a été écrit dans un langage codé pour encourager les chrétiens persécutés à rester fermes dans la foi. L’Apocalypse les encourage à rendre gloire à l’Agneau immolé vainqueur de la mort et du péché. Un homme crucifié, l’Agneau immolé, devient le centre du monde et reçoit l’adoration de toutes les créatures. Aujourd’hui encore, de nombreux chrétiens sont affrontés à la persécution ou tournés en dérision. Mais la puissance de l’amour est une force contagieuse que rien ni personne ne peut arrêter. En définitive, c’est l’amour et non le mal qui aura le dernier mot.

Le grand message de ces trois lectures bibliques d’aujourd’hui, c’est que le Christ ressuscité est toujours là, même si nous ne le reconnaissons pas toujours. Il ne cesse de nous rejoindre au cœur de nos vies, de nos doutes et de nos épreuves. Il vient nous pardonner. Avec lui, nous pouvons nous relever et renaître à la confiance. La nourriture qu’il nous propose pour refaire nos forces, ce n’est plus du poisson grillé, mais son Corps et son Sang. Comme Pierre, nous sommes confirmés dans l’amour. Nous sommes envoyés pour en être ses témoins et ses messagers.

Ce mois de Mai est dédié à la Vierge Marie. Ce que nous remarquons chez elle, c’est sa hâte quand elle se rend chez sa cousine Élisabeth. Dans la Bible, il y a un mot qui revient souvent, c’est « aussitôt ». Nous avons là un autre aspect de la foi. La réponse aux appels de Dieu ne supporte pas les longues attentes. La Vierge Marie part aussitôt et en toute hâte. La bonne nouvelle, c’est que Marie n’a pas changé. Nous pouvons l’appeler et “aussitôt”, elle accourt vers nous avec Jésus en elle ou près d’elle. C’est avec Jésus et Marie que nous pourrons être “disciples et missionnaires”.

Le christianisme est la religion de l’amour, puisque « Dieu est amour » (1 Jn 4,7). Ce n’est donc pas une religion de la loi, c’est la religion de l’Esprit d’amour qui nous donne la vie nouvelle du Ressuscité. Efforçons-nous de ne prononcer ces mots (aimer et amour) qu’avec grand respect. Laissons-nous renouveler par l’amour pour aimer à notre tour, à l’exemple du Seigneur.