Homélie pour la solennité de l'Ascention "C"

 Chimay : 29.05.2025

 ascension

Frères et sœurs, l’Évangile de ce jour nous dit que le Christ « fut enlevé dans le ciel » (Lc 24,51). L’Ascension est donc un acte de Dieu. Il est la réponse du Père à l’amour et à la fidélité que son Fils lui a témoignée. Le Père ramène auprès de lui celui qu’il avait envoyé vers nous. Le Christ est le premier bénéficiaire de ce geste de Dieu son Père. Mais il n’est pas le seul. En lui, c’est toute l’humanité qui est attirée vers le haut, vers Dieu, vers le Royaume promis.

Cette fête d’aujourd’hui nous fait donc contempler et célébrer le Christ qui est retourné vers son Père. « Il vaut mieux pour vous que je m’en aille » (Jn 16,7). La bonne nouvelle c’est que nous sommes tous appelés à partager ce retour vers le Père. Nous vivons dans l’espérance d’être un jour auprès de lui. Toute notre vie est une marche vers ce Royaume qu’il a promis à ses disciples. Même s’il ne nous « appartient pas de connaître les temps et les moments que le Père a fixés de sa propre autorité » (Ac 1,7). Et sur cette route, nous ne sommes pas seuls. Le Christ lui-même nous dit « qu’il est avec nous tous les jours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28,20).

L’Évangile nous parle aussi de la joie des disciples : « Ils se prosternèrent devant lui, puis ils retournèrent à Jérusalem, en grande joie » (Lc 24,53). Sous leurs yeux, Jésus passe d’une humanité de faiblesse à une humanité de plénitude dans l’amour. Élevé dans la gloire du Royaume, il nous indique le nouvel horizon de l’humanité sauvée par l’offrande de sa vie. De plus, les disciples ont compris qu’au matin de Pâques, Jésus a inauguré un nouveau mode de présence avec eux. Même s’ils ne le voient pas, il n’est pas parti, il n’est pas ailleurs. Il « a été enlevé au ciel » (Ac 1,11), mais il reste présent d’une autre manière. Et il nous rejoint chaque fois que « deux ou trois sont réunis en son nom » (Mt 18,20).

La lettre aux Hébreux (Hb 9,24-28 ; 10,19-23) vient de nous rappeler que le but final de notre vie n’est pas sur cette terre mais au ciel : « Avançons-nous donc vers Dieu avec un cœur sincère et dans la plénitude de la foi » (Hb 10,22). Il ne s’agit pas de nous détourner de nos responsabilités sur cette terre. Nous devons l’aimer et la rendre belle et bonne. Car ils sont nombreux ceux et celles qui souffrent de la haine, du racisme et de l’esclavage. Devant tant de souffrances, nous entendons régulièrement cette question : « Où est-il ce Dieu dont vous nous parlez ? » Alors notre mission est bien là, au cœur de nos vies, de rendre Dieu présent en servant dans nos frères.

La présence de Dieu peut être perçue de différentes manières. Pour certains, Dieu est présent dans le cœur des croyants à travers le Saint-Esprit, les guidant et les transformant. Pour d’autres, Dieu communique directement avec les hommes et les femmes de diverses manières, par la Bible, par les pauvres, par des événements de la vie ou par des expériences personnelles. La question de sa présence est donc subjective et personnelle, dépendant de la foi et de la perception de chacun. En réalité, la voix de Dieu n’est mentionnée explicitement que deux fois dans les Écritures : dans l’épisode du buisson ardent (Ex 3,1-10) et quand Moïse reçoit les tables de la loi sur le Mont Sinaï (Ex 19-20).

Les apôtres ont été envoyés dans toutes les nations. Leur mission a été de proclamer l’amour vainqueur. Aucune mort ne pourra arrêter sa course. C’est de cela que nous avons à témoigner dans notre vie de tous les jours. Le Christ ressuscité n’est plus visible à notre regard, mais le monde doit pouvoir contempler son visage à travers nous, entendre son message à travers nos paroles et toute notre vie. Et surtout, il doit y découvrir quelque chose de l’amour passionné de Dieu pour tous les hommes. C’est cela la confiance que Jésus nous fait. C’est à chaque instant que nous avons à rayonner de cette lumière qui vient de Dieu.

L’Ascension de Jésus fait naître en nous une grande espérance. C’est une joie très forte que nous ne pouvons pas garder pour nous. Le Christ vainqueur de la mort et du péché veut nous associer tous à sa victoire. Il nous donne chaque jour son Esprit Saint qui fait de nous des témoins et des messagers de son amour (Ac 1,8). C’est avec joie que nous nous engageons activement à l’épopée de l’évangélisation. Il n’est pas question de conquérir mais de servir et d’aimer au nom du Seigneur qui nous envoie. Nous sommes tous appelés à vivre en ce monde en témoignant de cette Bonne Nouvelle de l’amour de Dieu.

L’Évangile nous explique, a souligné dimanche le pape Léon,  « que nous ne sommes pas seuls dans les choix de vie. Le don de l’Esprit nous aide à grandir. Nous sommes d’autant plus capables d’annoncer l’Évangile que nous nous laissons conquérir et transformer, en permettant à la puissance de l’Esprit de nous purifier au plus profond de nous-mêmes, de rendre nos paroles simples, nos désirs honnêtes et limpides, nos actions généreuses » (Léon xiv à Saint-Jean-de-Latran, 25.05.2025). 

Cette entrée de Jésus dans la gloire du Père marque donc le début d’une nouvelle histoire. C’est le temps de l’Église, le temps de la mission qui commence. Les apôtres sont envoyés pour être les témoins et les messagers de la bonne nouvelle dans le monde entier (Ac 1,8). À plusieurs reprises, le Seigneur leur avait annoncé qu’ils auraient à souffrir des persécutions et des violences. D’autres seront tournés en dérision. « Bien plus, l’heure vient où tous ceux qui vous tueront s’imagineront qu’ils rendent un culte à Dieu. Ils feront cela, parce qu’ils n’ont connu ni le Père ni moi. Eh bien, voici pourquoi je vous dis cela : quand l’heure sera venue, vous vous souviendrez que je vous l’avais dit » (Jn 16,4a). Cela, nous le voyons tous les jours. Mais nous n’avons pas à nous laisser impressionner. En effet, c’est lui, le Christ, qui aura le dernier mot. Il est avec nous, « tous les jours et jusqu’à la fin du monde » (Mt 28,20) et « rien ni personne ne peut nous séparer de son amour » (Rm 8,38-39).

Dans dix jours, nous fêterons la Pentecôte. Marie était présente au milieu des apôtres qui s’y préparaient. Et elle ne demande qu’à être avec nous pour nous y aider. Avec elle et en communion les uns avec les autres, nous prions et nous supplions : « O Seigneur, envoie ton Esprit qui renouvelle la face de la terre » (Ps 103).