C 17 LUC 11,01-13 (17)
Chimay : 27.07.2025
Frères et sœurs, l’Évangile de ce dimanche nous parle de Jésus qui prie seul à l’écart. « Quand il eut terminé, un de ses disciples lui demanda : Seigneur, apprends-nous à prier comme Jean Baptiste l’a appris à ses disciples » (Lc 11,2). Jésus répond : « Lorsque vous priez, dites : Père » (Lc 11,3). Ce mot est le secret de la prière de Jésus. Il est la clé qu’il nous donne lui-même. C’est ainsi que nous pourrons, nous aussi, entrer en dialogue confidentiel avec Dieu qui l’a accompagné toute sa vie, si nous développons notre relation avec le Père.
Les premières demandes du Notre Père nous disent que nous devons nous préoccuper du règne de Dieu et de sa volonté. Nous sommes invités à donner toute sa place à Dieu dans notre vie. C’est par notre vie que la sainteté de Dieu est manifestée aux yeux des autres.
Trois autres requêtes du Notre Père viennent compléter cette prière que Jésus nous enseigne. Ces trois requêtes concernent le pain, le pardon et l’aide dans les tentations. On ne peut pas vivre sans pain ; on ne peut pas vivre sans pardon ni sans l’aide de Dieu dans les tentations. Saint Cyprien nous dit que le pain le plus essentiel, c’est celui de l’Eucharistie. Nous devons prier pour que tous les hommes se nourrissent de ce pain pour être transformés par et dans le Christ. C’est là que tous trouvent la lumière et la force de sa grâce.
Le pardon est avant tout celui que nous recevons de Dieu : il se montre Père quand il libère nos cœurs et nous fait revivre. Nous sommes tous des pécheurs pardonnés par l’infinie miséricorde du Père. Ce pardon nous rend capables de gestes concrets de réconciliation fraternelle. Si nous ne reconnaissons pas que nous sommes des pécheurs pardonnés, nous ne pourrons jamais accomplir des gestes de réconciliation fraternelle. C’est en accueillant le pardon de Dieu que nous apprenons à pardonner aux autres.
« Et ne nous laisse pas entrer en tentation… » (Lc 11,4). Nous savons que nous sommes tous exposés aux pièges du mal. La tentation, c’est quand nous pensons que Dieu nous abandonne et que nous cherchons un autre bien. Jésus nous apprend à nous tourner vers le Père pour lui demander de nous libérer de ce mal qui cherche à nous détruire.
L’enseignement de Jésus se poursuit par deux paraboles. Il prend pour modèle l’attitude d’un ami à l’égard d’un autre ami puis celle d’un père à l’égard de son fils. Quand le résultat de notre prière n’est pas ce que nous avons attendu, il faut garder la confiance, car il s’agit d’une prière faite à notre Père. Et « quel père donnerait un scorpion à son fils qui demande du pain ? » (Lc 11,11). Le Père donne ce que nos cœurs demandent, mais pas toujours de la manière attendue. Il nous faut avoir confiance pour être capables de découvrir l’amour de Dieu dans nos vies. Mais comme pour Abraham dans le livre de la Genèse (Gn 18,20-32), nous devons lui présenter nos demandes avec audace et insistance. C’est notre façon de participer à son œuvre de salut.
Comprenons bien : le but n’est pas de convaincre Dieu mais de fortifier notre foi et notre patience. C’est quand même une lutte avec Dieu pour les choses importantes de notre vie. Comme Abraham, nous sommes invités à nous tenir en présence du Seigneur ; la mission des communautés chrétiennes, c’est précisément d’intercéder pour ce monde que Dieu aime. La prière que nous adressons pour le monde à notre Père nous aide à changer notre regard sur lui. Comme Abraham, nous avons la ferme espérance que le petit reste des fidèles peut sauver la multitude.
Dans l’Évangile de ce dimanche, Jésus précise que ce qu’il faut surtout demander, c’est l’Esprit Saint. C’était la prière des apôtres qui se préparaient à la Pentecôte. « Combien plus le Père céleste donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! » (Lc 11,13). Cette dernière phrase, avec laquelle Jésus conclut cette tendre description de l’amour de son Père, nous rappelle quel est notre vrai besoin : l’Esprit-Saint. Pourquoi ? Pourquoi est-ce que Jésus ne dit pas : « Combien plus le Père céleste donnera-t-il tout ce que ses enfants lui demanderont ? » Ce dont nous avons vraiment besoin, c’est d’entrer dans l’intimité avec Dieu : nous savoir aimés de Lui. L’aimer de toute notre personne, et aimer notre prochain, comme membre de notre propre corps.
Bien souvent nous nous découvrons bien pauvres dans cet amour ; nous sommes plus égoïstes que généreux. Et nous sommes préoccupés par nos soucis matériels et humains, de la vie de tous les jours, et nous sentons que nos besoins les plus urgents sont plutôt d’ordre matériel que d’ordre spirituel. Mais justement être chrétien, c’est vivre une vie entière dans une attitude filiale, et non pas une vie familiale, une vie de travail, une vie de loisir, et une vie chrétienne, comme s’il s’agissait de facettes différentes de notre vie.
Quand nous ressentons ces besoins matériels, tournons-nous vers le Père, dialoguant avec Lui de ce que nous sentons, de ce dont nous avons besoin, demandons-Lui son aide, mais que notre prière soit toujours celle d’un enfant qui a pleinement confiance en Son Père. Ainsi nous progresserons dans notre intimité avec Lui. La voie de la confiance, la petite voie de Saint Thérèse de l’Enfant-Jésus, c’est de laisser Dieu s’occuper de nous, dans une confiance absolue. Lui, notre Père, sait bien ce dont nous avons besoin. Lui, qui a envoyé Son Fils mourir sur la Croix pour nous sauver, pourrait-Il nous abandonner ?
Celui qui prie fait grandir sa foi. Quand nous nous tournons vers Dieu notre foi se développe. Plus je demande, plus je construis une relation personnelle avec le Père. Si je devais ne jamais me tourner vers lui pour mes besoins, je ne réaliserais jamais combien il veut faire partie de ma vie. Mais quand je dois demander, particulièrement si je dois y mettre du temps et de l’effort, il sera très clair que tout vient de Dieu. Ce n’était pas moi, ni la chance, ou toute autre chose, mais Dieu. « Demandez et vous recevrez » (Lc 11,9).
Dans sa lettre aux Colossiens (Col 2,12-14), saint Paul nous rappelle que nous sommes associés à la victoire du Christ sur la mort et le péché. C’est au nom de cette Bonne Nouvelle que nous pouvons nous unir à sa prière confiante pour nous et pour le monde entier. Cette prière, nous la faisons passer par Marie. Toute son existence a été entièrement animée par l’Esprit de Jésus. Qu’elle nous apprenne à nous tourner vers notre Père avec confiance et persévérance.
Enfin, plus que la prière de demande, le salut est au cœur des textes de ce dimanche. Saint Paul annonce aux Colossiens que le Christ, par le baptême, les a sauvés de la mort par le pardon des péchés. Abraham, dans une prière digne d’un marchandage commercial de l’Orient, implore la miséricorde divine afin que les éventuels justes de Sodome ne périssent pas d’un châtiment immérité. Enfin, le Christ, en donnant la prière du Notre Père à ses disciples, insiste sur l’efficacité des demandes tenaces afin d’obtenir ce que l’on désire. Ainsi, pour participer à la vie nouvelle des hommes sauvés, nous recevrons du Père l’Esprit Saint, si nous le lui demandons.