C CHRIST-ROI LUC 23, 35-43 (17)
Chimay : 23.11.2025
Frères et sœurs, nous célébrons aujourd’hui le Christ, Roi de l’univers. Dans la Bible, la vraie vocation du roi est de servir le plus petit au nom de Dieu. Ce Roi montre que Dieu est amour, que son Royaume est fondé sur l’amour et qu’il s’enracine dans le cœur en donnant à celui qui l’accueille, paix, liberté et plénitude.
Dans le deuxième livre de Samuel (2 Sm 5,1-3), nous apprenons que David a été choisi par Dieu comme roi d’Israël pour être le pasteur de son peuple, pour conduire son peuple, le protéger, être son berger. C’est cette mission qui a été confiée à David. Lui et ses successeurs ne sont que des lieutenants du Seigneur. Ils sont chargés de faire régner le droit et la justice, en particulier envers les plus pauvres. Tout cela doit se faire dans le respect de l’alliance conclue avec son peuple.
Jésus sera acclamé comme “fils de David”. Mais sa mission ne sera pas limitée au seul peuple d’Israël. Tout l’Évangile nous le présente comme celui qui vient réconcilier tous les peuples de la terre en livrant son corps et en versant son sang. Jésus rejoint par sa Passion tous les blessés de la vie. Offrant sa vie par amour, Jésus est le roi de tous les hommes. Il compte sur chacun de nous pour participer à son œuvre de réconciliation et de rassemblement. Dans une société où les pauvres sont de plus en plus nombreux, nous sommes envoyés pour être les porteurs de la sollicitude du Christ, Roi de l’univers.
Dans l’évangile d’aujourd’hui, nous apprenons que le premier à suivre Jésus jusqu’à la mort a été le bon larron, le malfaiteur crucifié auprès de lui. Mais qui est ce bon larron ? Les Evangiles ne nous disent rien de plus sinon qu’il fut un voleur, condamné à mort et crucifié avec Jésus. Cette fin admirable du bon larron nous le rend attachant et nous aimerions en savoir plus à son sujet. Heureusement la tradition nous a transmis d’autres informations, qui aideront à mieux connaître ce saint. La tradition nous a conservé le nom des deux larrons, Gesmas pour le mauvais « qui ne craint pas Dieu », et Dismas pour le bon larron, dont le nom signifie « Celui qui a du cœur ».
Dismas était le fils d’une famille de brigands. La Sainte Famille, durant la fuite en Egypte fut accueilli par les parents de Dismas alors qu’il était encore petit enfant mais atteint de la lèpre. Il fut guéri miraculeusement par l’eau que la sainte Vierge avait utilisée pour laver l’Enfant Jésus, et dans laquelle la mère de Dismas plongea son enfant. Légende ou pas ? Ce miracle sensible se produisit une nouvelle fois, d’une manière spirituelle, sur la croix, quand, par son propre sang, Jésus purifia Dismas de la lèpre du péché.
Les deux larrons avaient été interpellés lors d’une attaque de brigandage. Gesmas en avait été l’instigateur et aurait entraîné Dismas à voler. Ce dernier est décrit comme dépravé mais sans méchanceté. Quoiqu’il en soit les deux voleurs se trouvaient à la droite et à la gauche du Sauveur au sommet du Golgotha (Mt 27,38).
Cependant le bon larron est l’exemple du repentir. Avec dégoût, il se détourne des égarements de sa vie passée et reconnaît publiquement son ancienne adhésion au péché, mais aussi son amour total pour le Christ. Il accepte les souffrances de la crucifixion et les tourments de la mort. Il reconnaît publiquement qu’il a mérité tout cela. Dismas est la preuve vivante de la puissance inimaginable du Sang du Christ et de l’infinie miséricorde de Dieu. Par la force de son Sang, répandu sur la Croix, le Christ provoque la transformation intérieure de Dismas et, en l’espace de trois heures, fait d’un malfaiteur un saint...
Dismas confesse Jésus-Christ avec courage. Il est l’avocat du Crucifié et blâme les calomniateurs. Il annonce ouvertement l’innocence de Jésus et reconnaît le Christ comme son Seigneur et son Dieu. Du haut de sa croix, le bon larron devient un maître de la prière et un apôtre de la foi au Christ. Humblement, plein d’espoir et de foi, il prie le Seigneur de l’accueillir dans son Royaume. Il craint Dieu et il est rempli d’humilité, de foi et de confiance. Sa prière pénètre jusqu’au Cœur de Jésus. Dismas devient la consolation de Jésus crucifié et de sa douloureuse Mère « qui se tient au pied de la croix » (Jn 11,1). Alors que Jésus est bafoué par ceux qui l’entourent, le larron se convertit grâce aux mérites des souffrances du Christ et des supplications de la Vierge Marie. Il reçoit le regard de grâce du visage du Christ. Le larron, crucifié à la droite du Seigneur, trouve, par le Fils de Dieu, le chemin vers le Père. Il est accueilli dans la lumière du visage du Christ.
Dans sa lettre aux Colossiens (Col 1,12-20), c’est le même message que Saint Paul nous adresse : Jésus n’est pas un roi à la manière de ceux de ce monde. Sa puissance est infiniment supérieure à toutes les forces royales d’ici-bas. Elle est unique. Elle concerne le monde d’en haut, le monde divin. Le Roi Jésus nous apporte la Rédemption, le pardon des péchés. Il est le chemin qui nous permet d’aller vers le Père. Il est l’image du Dieu invisible. Il est notre Roi parce qu’il est la tête de l’Église. En livrant son Corps et en versant son Sang, il nous ouvre un passage vers le Royaume de Dieu. « Dieu a jugé bon qu’habite en lui toute plénitude et que tout, par le Christ, lui soit enfin réconcilié, faisant la paix par le sang de sa Croix, et la paix pour tous les êtres sur la terre et dans le ciel » (Col 1,20).
Dans l’Évangile, saint Luc nous donne la couleur ce cette royauté du Christ : « Une inscription était placée sur sa tête : “Celui-ci est le roi des Juifs” » (Lc 23,38). C’était, bien sûr, un titre de dérision, vis-à-vis de Jésus ; il était également très méprisant pour les juifs, de la part de Pilate ; un peuple dont le roi est crucifié n’a pas à être fier. Et pourtant, c’est bien par son sacrifice que Jésus manifeste sa Royauté. La croix est le trône où il est monté librement pour dire son amour non seulement aux juifs mais aussi au monde entier ; car « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » (Jn 15,13).
L’Évangile nous montre plusieurs manières de répondre à ce sacrifice du Christ : le peuple restait là à observer, les chefs religieux ainsi que les soldats le tournaient en dérision ; l’un des malfaiteurs condamnés en même temps que lui l’injuriait. Jésus ne répondait pas à ces provocations. Mais il accueille la prière de celui que nous appelons le bon larron : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume » (Lc 23,42).
C’est aussi cette prière que nous faisons monter vers le Seigneur : « Souviens-toi de nous ». Nous reconnaissons en lui l’image du Dieu invisible, le premier ressuscité, la tête de l’Église. Il nous répond par la miséricorde. Cette grâce du jubilé que nous venons de vivre tout au long de cette année doit se répandre dans le monde entier. À travers nos paroles, nos actes et toute notre vie, nous avons à être les messagers de cette miséricorde auprès des plus démunis.
En ce dernier dimanche de l’année liturgique, que notre prière se fasse plus ardente : oui, Seigneur, souviens-toi de nous dans ton Royaume. Souviens-toi des blessés de la vie, des victimes de la précarité, des guerres et des violences. Fais de nous des témoins et des messagers de l’amour qui est en toi. Car nous avons la ferme espérance qu’un jour tu nous répondras : « Aujourd’hui, tu seras avec moi dans le paradis » (Lc 23,43).
