Homélies et conférences du Père abbé - Dom Damien Debaisieux

Saint Pierre et Saint Paul

(Mt 16,13-19)

Juin 2020

Frères et sœurs, ces dernières années, l’Eglise est et a été secouée par des scandales. Certains de ses prêtres, de ses évêques, mais aussi certaines de ses figures les plus emblématiques, ont été accusés pour des actes graves ou encore des silences inaudibles. Depuis, c’est l’autorité même au sein de l’Eglise qui est interrogée et remise en cause ; ce sont certaines de nos certitudes qui sont ébranlées ; et c’est l’Eglise elle-même qui vacille avec elles. Dernière conséquence de ces interrogations, une femme, la théologienne Anne Soupa, s’est déclarée candidate pour devenir archevêque de Lyon. Pourtant, aujourd’hui, nous fêtons dans la joie, avec toute l’Eglise, les apôtres Pierre et Paul, les colonnes de cette Eglise, et avec eux nous prions pour leurs successeurs, pour ceux qui ont la charge du troupeau du Seigneur et de la transmission de son message. Alors peut-être que cette fête, les textes de la liturgie, peuvent nous aider à mieux nous situer dans cette crise que traverse l’Eglise.

Le Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ

(Jn 6,51-58)

Juin 2020

Frères et Sœurs, nous le disions au début de cette célébration, pendant trois mois les circonstances vous ont privés de l’eucharistie. Alors il aurait été probablement plus judicieux de vous demander, à vous, de faire l’homélie à ma place ; de nous dire comment vous avez vécu cette privation, cette absence ; et de nous interpeler en nous expliquant comment cette fête d’aujourd’hui et ces paroles de Jésus résonnent en vous. Car paradoxalement, le manque vous a peut-être fait reconnaître davantage qu’il est le pain vivant, Celui qui donne la vie, Celui qui donne à la vie éternelle de demeurer en nous.

Jeudi Saint

Avril 2020

 

Chers Frères, ce soir nous faisons mémoire d’un repas, de la sainte Cène, mais ce repas n’a de sens que s’il s’inscrit dans l’ensemble du mystère pascal. Ce soir, nous célébrons donc déjà la mort et la résurrection du Seigneur. Par contre, le récit de ce repas, et ici sous la forme plus spécifique du lavement des pieds, nous aide à comprendre, à entrer dans le mystère de cette mort et de cette résurrection, dans le don et le salut que le Christ nous apporte.

5e dimanche de Pâques A

Jn 14,1-12

Mai 2020

Chers Frères, avec cet évangile, nous nous situons au soir de la Cène, au soir du lavement des pieds. Judas vient de quitter le groupe pour accomplir sa besogne, Jésus déclare à ses disciples qu’il n’est plus avec eux que pour peu de temps, et il annonce à Pierre qu’il l’aura « renié avant qu’un coq ne se mette à chanter. » (13,38). Dans ce contexte où tout semble se précipiter, où tout semble s’effondrer pour s’ouvrir sur un inconnu incertain voire hostile – ce qui pourrait aussi correspondre à notre actualité - les mots d’encouragement de Jésus sont les bienvenus : « Que votre cœur ne soit pas bouleversé. Vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi. » (1).

Chers Frères, en débutant ce Carême, lors de l’homélie du Mercredi des Cendres, nous avions évoqué l’hypocrisie, la dualité plus ou moins prononcée qui habite chacun de nous. Et nous étions invités, pendant ces 40 jours, à nous en affranchir, à nous libérer du regard sur soi, du regard de l’autre, à faire grandir la personne que nous sommes et non pas le personnage, en regardant Celui dont l’amour ne peut nous manquer. L’hypocrisie, disions-nous, était finalement l’expression de cette peur de ne pas être aimé, et elle était aussi une entrave à la foi puisqu’elle ne s’appuyait pas sur Dieu, le reléguant à la seconde place, le rejetant en dehors de la ville.

Vigile pascale

(Mt 28,1-10)

Avril 2020

Chers Frères, nous sommes en confinement, les portes sont fermées, nos mouvements sont restreints et le monde semble comme s’être arrêté ; il se soigne et s’interroge. Et tous, nous attendons « l’heure où, comme dans l’évangile, commencer(a) à poindre le premier jour de la semaine » (1), la fin de ce mauvais rêve surréaliste. Matthieu nous parle lui aussi de ce moment où tout s’arrête, du Grand Sabbat, puis de cet après, et c’est alors le mouvement, l’ouverture, l’air pur : le ciel, une pierre roulée, un tombeau qui s’ouvre comme un carcan qui nous tombe des épaules ; un mouvement ininterrompu de la course des femmes à l’apparition de Jésus, en passant par la descente de l’ange et en imaginant déjà les disciples en Galilée au bord du lac. Le mouvement, la vie, et par deux fois, comme une espérance pour aujourd’hui : « Soyez sans crainte » (5.10).

L’Annonciation 2020

(Luc 1,26-38)

Chers frères,

en cette fête de l’Annonciation, comme neuf mois plus tard en celle de la Nativité, c’est le mystère de l’Incarnation que nous célébrons : « Et le Verbe s’est fait frère » comme l’a écrit le Bienheureux Christian de Chergé. Ainsi, face à cette proximité de Dieu dans chacune de nos vies et dans celle de notre communauté, nous pouvons reprendre la question de Marie : « Comment cela va-t-il se faire… ? » Comment Dieu peut-il se faire si proche et comment Dieu peut-il être frère, être dans le frère ? « L’ange lui répondit : ‘L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre’ ». C’est donc l’Esprit qui est ici à l’œuvre et que nous devons discerner dans notre quotidien.