4e dimanche de Pâques A

Jn 10,1-10

Avril 2023

« Je suis la porte des brebis » (7). Voilà comment Jésus se qualifie, comme une simple porte, dirions-nous, mais surtout comme LA seule véritable porte. Alors que nous fêtons, en ce temps pascal, son passage de la mort à la vie, son passage du monde au Père, Jésus nous dit qu’il est l’unique passage, le passage obligé ou refusé. Si nous voulons « la vie en abondance » (10),  il nous faut, comme Jésus le dit, « écout(er) sa voix […], le suiv(re) […], entre(r) en passant par » lui (3.4.9). Jésus est pour nous la porte de la vie et alors, évidemment, nous pouvons nous demander si c’est effectivement le cas, s’il est le passage que nous utilisons chaque jour.

Dans l’histoire d’Israël, comme dans l’histoire des peuples, la porte ou les portes sont importantes. C’est ce qui permet d’entrer dans une ville et d’assurer, avec ses remparts, sa sécurité. Elle donne ainsi à la cité de se constituer en communauté. Nous sommes, ensemble, ce matin, une assemblée, une communauté, parce que nous avons franchi la même porte, et cette porte c’est le Christ qui nous a invités, qui nous fait entrer dans sa vie. Nous sommes, nous les moines, une communauté, parce que le Christ nous a appelés pour nous rassembler et, aujourd’hui encore, il est celui qui nous donne de poursuivre notre route en communauté. Sans lui, sans ce passage par lui, pas d’avenir possible pour notre communauté, pas d’unité, pas de paix.

Le Christ est donc la porte qui va de l’homme à l’homme, qui ouvre vers les autres et avec les autres. Il est aussi celui qui, par son incarnation et sa résurrection, nous ouvre la porte, le chemin pour aller, pour retourner au Père ; il est l’unique médiateur.

Jésus est la porte de notre vie ; j’oserais dire le trou de serrure ou encore l’horizon par lequel il nous faut envisager la vie. Ne pas chercher à escalader cette vie, comme le voleur ou le bandit dont il nous parle dans l’évangile. Pour cela, il nous appelle à « écoute(r) sa voix » dans la prière et l’Ecriture, dans les autres et dans les évènements. Entendre ce qu’il dit au monde et que le monde n’entend pas. Entendre qu’il nous « appelle chacu(n) par (notre) nom ». Quel est ce nom que Dieu me donne ? Ce nom par lequel il ne cesse de m’appeler à la vie et me donner la vie ? Le reconnaissons-nous ?

Le Christ, le bon berger, « marche à (notre) tête » (4). Dans cette vie et ce monde parfois si difficile, il est rassurant de savoir qu’il est là, devant nous, avec nous, jusque dans nos épreuves. Il « marche à (notre) tête et les brebis le suivent, car elles connaissent sa voix », nous dit Jésus. Nous ne pouvons le suivre que si nous reconnaissons sa voix, que si nous nous sommes habitués à sa voix, que si nous avons reconnu – peut-être rien qu’une fois, mais une fois pour toutes les fois - au plus profond de nous, que ça ne pouvait être que sa voix. Cette voix qui mène au « pâturage […, à] la vie en abondance » (9.10).

Dans une homélie, le pape François nous invitait à écouter cette voix et à ne pas la confondre avec celle « des voleurs et des bandits » (8). Il donnait ainsi des critères de discernement que je vous livre pour conclure. « La voix de Dieu n’oblige jamais : Dieu se propose, il ne s’impose pas. En revanche la mauvaise voix séduit, assaillit, contraint : elle suscite des illusions éblouissantes, des émotions alléchantes, mais passagères. Au début elle flatte, elle nous fait croire que nous sommes tout-puissants, mais ensuite elle nous laisse avec un vide intérieur et elle nous accuse : “Tu ne vaux rien”. La voix de Dieu, en revanche, nous corrige, avec beaucoup de patience, mais elle nous encourage toujours, nous console : elle alimente toujours l’espérance. La voix de Dieu est une voix qui a un horizon, au contraire la voix du mauvais t’amène droit au mur. […] La voix de l’ennemi détourne du présent et veut que nous nous concentrions sur les craintes de l’avenir ou sur les tristesses du passé […]. Au contraire la voix de Dieu parle au présent : “Maintenant tu peux faire du bien, maintenant tu peux exercer la créativité de l’amour, maintenant tu peux renoncer aux regrets et aux remords qui tiennent ton cœur prisonnier” […]. Les deux voix suscitent en nous des questions différentes. Celle qui vient de Dieu sera : “Qu’est-ce qui me fait du bien ?”. Pour sa part le tentateur insistera sur une autre question : “Qu’est-ce que j’aimerais faire ?”. […] La mauvaise voix tourne toujours autour du moi, de ses pulsions, de ses besoins, du tout et tout de suite […]. La voix de Dieu, en revanche, ne promet jamais la joie à bas prix : elle nous invite à dépasser notre moi pour trouver le vrai bien, la paix. […] Le mal ne donne jamais la paix, il donne une frénésie avant et il laisse amer ensuite […]. L’ennemi nous dira : “Ferme-toi en toi-même, personne ne te comprend ni ne t’écoute, ne fais pas confiance !”. Le bien, au contraire, invite à s’ouvrir, à être limpides et confiants en Dieu et dans les autres. » Que cette eucharistie nous donne la grâce de vivre de cette voix.