A PÂQUES 01 JEAN 20, 01-09 (10)
Chimay : 09.04.2023
Frères et sœurs, le premier jour de la semaine, Marie-Madeleine se rend au tombeau de Jésus. Pour elle, c’est un jour de tristesse. C’est souvent le cas dans notre vie quand nous nous rendons sur la tombe d’un être cher. Mais aujourd’hui, il y a une tristesse de plus : ce n’est plus seulement le corps d’un ami qui finit dans la tombe ; c’est l’espérance d’un règne nouveau qui est anéantie.
L’Évangile de saint Jean nous dit qu’il faisait encore sombre ; comprenons bien : ce n’est pas seulement l’obscurité de la nuit. Il veut nous montrer que la lumière est en train de l’emporter sur les ténèbres. Elle chasse la nuit dans laquelle les hommes étaient plongés. Jésus ressuscité est la Lumière qui luit dans les ténèbres. Cette lumière, rien ne peut l’arrêter ; rien ne peut l’empêcher de briller.
Arrivée devant le tombeau, Marie-Madeleine découvre que la pierre a été roulée. Elle en déduit qu’on a enlevé le corps de Jésus ; elle court prévenir Pierre et Jean. Tous deux arrivent devant le tombeau vide. Ils voient les linges restés sur place et bien rangés. Pierre est perplexe ; mais pour Jean, c’est différent : quelques mots disent sa foi : « Il vit et il crut » (Jn 20,8). Nous nous rappelons qu’il avait suivi Jésus jusqu’au pied de la croix ; il avait participé à l’ensevelissement. Il voit bien qu’il n’y a pas de désordre provoqué par une violation de sépulture. Plus tard, Jésus dira : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu » (Jn 20,29).
Nous n’aurons jamais d’autre preuve de la résurrection de Jésus que le tombeau vide. Bien sûr, il y a les apparitions du Christ ressuscité. Les quatre Évangiles nous en donnent le témoignage. Mais aucune de ces preuves n’est vraiment contraignante. Si nous croyons au Christ ressuscité, c’est parce que nous faisons confiance au témoignage des apôtres et à celui des communautés chrétiennes qui nous a été transmis de génération en génération.
La lecture des Actes des Apôtres (10,34-43), nous rapporte un discours de Pierre après la résurrection. Nous nous rappelons qu’il avait renié son Maître devant de simples domestiques. Aujourd’hui, il ose proclamer la bonne nouvelle de sa résurrection dans la ville de Césarée qui est le lieu de résidence de Pilate et de ses légions. Les mots de ce discours de Pierre sont très audacieux : « Celui qu’ils ont supprimé en le suspendant au bois de la croix, Dieu l’a ressuscité le troisième jour » (Ac 10,39-40). Tout cela se passe chez le centurion de l’armée romaine. C’est une manière de dire que le salut est offert à tous, même aux païens. Dieu n’exclut personne. Quelle que soit sa nation ou sa langue, toute personne peut recevoir le salut dans la mesure où elle accueille l’Évangile. C’est pour tous que le Christ a donné sa vie sur la croix.
C’est aussi ce témoignage de foi en Jésus ressuscité que nous trouvons chez saint Paul. Cette résurrection n’est pas un simple retour en arrière comme c’était le cas pour Lazare. Paul nous dit qu’il est « assis à la droite de Dieu » (Col 3,1). Il est monté au ciel ; il a reçu l’autorité de la part du Père. C’est un appel pour nous à lever les yeux vers le ciel et à rechercher « les réalités d’en haut » (Col 3,1). Si nous croyons en Jésus ressuscité et si nous le suivons, plus rien ne peut être comme avant. Cette résurrection du Christ nous provoque à un renouveau de notre vie, un renouveau de la prière, une joie de découvrir et de vivre l’Évangile.
Tout cela passe par des décisions concrètes : sortir du « tombeau » de notre égoïsme pour vivre un amour vrai, rouler la pierre du découragement qui nous emprisonne et nous empêche d’aller de l’avant, ne pas nous laisser emporter par la rancune et la vengeance mais faire triompher le pardon et la miséricorde. C’est par notre manière de vivre que nous pourrons montrer que le Christ est vivant et qu’il transfigure ceux et celles qui accueillent sa force de vie.
C’est en vivant ainsi que nous pourrons être porteurs de vie et d’espérance. Le Christ ressuscité nous associe tous à sa victoire sur toutes les forces du mal qui cherchent à détruire l’homme. Nous sommes tous appelés à choisir la vie et à nous laisser envahir par l’amour de Dieu. Nous vivons dans un monde où beaucoup souffrent de la guerre, de la violence, de la haine et du mépris des autres. Mais le Seigneur ressuscité ne demande qu’à enlever de nos cœurs cette pierre qui nous enferme dans les ténèbres. Il veut que la lumière de Pâques brille dans le monde entier.
Après avoir passé des mois, voire des années à ses côtés, les disciples n’étaient pas prêts pour la résurrection de Jésus. À constater leur hésitation et leur désarroi, ils semblent ne rien avoir anticipé, prévu, deviné de ce qui pouvait se passer. Au matin de Pâques, alors qu’ils se rendent près du tombeau, les événements les prennent au dépourvu. Ils ne comprennent pas ce qu’ils voient, et ce qu’ils vivent ne fait pas d’emblée sens pour eux. Ils n’établissent pas de lien entre la réalité qui s’impose à eux et l’enseignement reçu de la part de Jésus. Ils sont pourtant des témoins directs, des compagnons de route, des amis proches qui ont cru en Jésus et ont reconnu en lui l’homme de Dieu. Pourtant, l’évidence de la Résurrection ne s’imposera à eux que quand ils constateront la puissance des faits. Alors seulement, ils arriveront à croire ce qu’ils savaient déjà et à en vivre.
Nous voici, à notre tour, à la place de Marie Madeleine et des deux disciples, un dimanche de Résurrection. Nous savons des choses sur Jésus, sur son histoire et ses enseignements. Mais la fête de Pâques nous invite à faire un pas de plus, celui qui consiste à croire ce que nous savons et que, parfois, nous confessons. Pâques nous place devant un choix. Cette fête est une invitation à ne pas nous contenter des témoignages et du savoir que nous véhiculons. Elle nous met au défi d’accepter une vie qui ne serait pas basée sur le doute et la crainte. Si Jésus a fait confiance le premier, il appelle chacun de ses disciples à le suivre.
Cette bonne nouvelle a été transmise de génération en génération. C’est à nous maintenant de prendre le relai pour qu’elle continue à être annoncée. Dans certains pays, les chrétiens le font au péril de leur vie. Ils sont nombreux ceux et celles qui sont persécutés, poursuivis et mis à mort à cause de leur foi en Jésus. Mais rien ne peut empêcher la progression de la Parole de Dieu. Nous-mêmes, nous sommes envoyés dans le monde d’aujourd’hui pour être témoins et messagers de Jésus ressuscité. Notre mission c’est de dire et de témoigner par nos paroles et nos actes. Nous sommes envoyés vers ceux qui vivent dans la nuit de l’incroyance, de l’indifférence.
Aujourd’hui comme autrefois, notre Dieu reste celui qui a vu la misère de son peuple (Ex 3,7). Il veut à tout prix le sauver. Et il compte sur nous pour participer à cette mission. Mais le principal travail, c’est lui qui le fait dans le cœur de ceux et celles qu’il met sur notre route. L’Évangile restera toujours une force communicative pour les hommes d’aujourd’hui. La parole que nous avons à proclamer ce n’est pas la nôtre mais celle de Jésus. C’est pour cela que nous avons sans cesse à nous ajuster à lui. C’est avec lui que notre vie pourra devenir un authentique témoignage de la joie de l’Évangile.