Sainte Marie, Mère de Dieu
(année A)
Scourmont, 1er janvier 2023
Nb 6, 22-27 - Ps 66
Gal 4, 4-7 - Luc 2, 16-21
Marie, mère de Dieu
1. Nous prions Marie, mère de Dieu
Nous fêtons aujourd’hui « Sainte Marie, mère de Dieu ». Le titre de « Mère de Dieu » nous est bien familier. Nous le trouvons dans chacune des quatre principales prières eucharistiques, où l’on fait mémoire de la « Bienheureuse Mère de Dieu » ; les litanies des saints comportent toujours l’invocation « Sainte Marie, mère de Dieu » ; les textes de la mémoire de la Vierge, aux offices, utilisent souvent l’expression : « Mère de Dieu » ; et nous ne devons pas oublier le « Je vous salue, Marie », récité dans le secret des cœurs : « Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous pauvres pécheurs. »
2. Ce titre est contesté
Sommes-nous conscients que cette expression de notre foi choque ceux qui ne la partagent pas, en particulier les juifs et les musulmans ? Ils ne le disent pas toujours, mais c’est un point important pour eux. Et ils ne sont pas les seuls à la contester. J’ai entendu un jour un évêque d’un pays à majorité musulmane dire qu’il n’acceptait pas cette expression. Un prêtre, dans la Prière Eucharistique, change habituellement « Mère de Dieu » en « Mère du Christ ». Les musulmans et les juifs auraient-ils donc raison dans le rejet de cette formule ? Comment peut-on dire, en effet, que Dieu, pur esprit, éternel et infini, a été engendré par une femme, être corporel, temporel et fini ? Comment une créature peut-elle engendrer son Créateur ?
3. Pourtant un concile au Ve siècle
Et pourtant !… Pourtant, ce n’est pas d’aujourd’hui que l’Église appelle Marie « Mère de Dieu ». En 431 (il y a près de 1600 ans), des évêques étaient réunis en concile à Éphèse, dans la Turquie actuelle ; ils ont proclamé le texte suivant pour définir la foi de l’Église : « (Les saints pères) se sont enhardis à nommer la sainte Vierge Mère de Dieu (theotokos), non que la nature du Verbe ou sa divinité ait reçu le début de son existence à partir de la sainte Vierge, mais parce qu’a été engendré d’elle son saint corps animé d’une âme raisonnable ; le Verbe s’est uni à ce corps selon l’hypostase et pour cette raison il est dit avoir été engendré selon la chair. » Ce texte, un peu condensé, est au cœur de notre foi, et de notre fête d’aujourd’hui.
4. Comment comprendre ?
Tout part de la personne du Christ. Remarquons qu’on ne peut jamais parler avec justesse de Marie sans parler de son Fils : le mystère de Marie ne se comprend que par le mystère de Jésus. Le Christ est homme et Dieu. En tant que Dieu, il n’est évidemment pas né de Marie ; c’est en tant qu’homme qu’il est né d’elle. Marie est donc bien la mère de l’homme Jésus. Là-dessus, tout le monde est d’accord, même les musulmans et les juifs. Mais les chrétiens disent davantage. L’humanité de Jésus n’a pas d’existence propre, autonome, en dehors de la personne du Verbe, la deuxième personne de la Trinité. C’est ce qu’on veut dire quand on parle des deux natures du Christ, divine et humaine, en une seule personne (cf. Concile de Chalcédoine en 451). Si donc le Christ est une seule personne, la personne du Fils de Dieu, en tout égal au Père, alors on peut dire que Marie est Mère de Dieu.
Refuser cette appellation, ce serait implicitement reconnaître deux personnes dans le Christ, une personne humaine et une personne divine, qui seraient unies certes, mais tout de même distinctes. Tous les Pères de l’Église ont déclaré hors de la foi chrétienne ceux qui pensent ainsi. Vous me direz : qu’est-ce que cela peut bien nous faire ? Eh bien, c’est capital pour nous aussi, pour chacun de nous. Si le Christ n’a pas uni en sa seule et unique personne la nature divine et la nature humaine, il n’a pas pu libérer du péché notre nature humaine. C’est seulement s’il est à la fois homme et Dieu en une seule personne qu’il peut nous sauver. S’il en était autrement, l’Église n’aurait plus de sens, les sacrements ne seraient plus que des symboles sans effet, notre foi chrétienne serait vide.
5. Méditer et prier
Voilà tout l’enjeu du titre « Mère de Dieu » pour la solennité de ce premier jour de l’année. Il n’est pas seulement bon pour la piété, il est indispensable à notre foi et à notre existence de fils et filles de Dieu.
Le lien de Marie avec son Fils et avec son Dieu est tout à fait particulier, et c’est peut-être cela que nous sommes invités à méditer aujourd’hui. Marie est mère de Jésus, qui est le Verbe de Dieu, et donc en même temps son créateur. Il est inutile de chercher à comprendre rationnellement ce qui apparaît contradictoire : nous ne pourrons jamais percer le mystère de l’Incarnation de Dieu dans la nature humaine, mais nous pouvons regarder, contempler, tourner autour, pour le découvrir sous différents aspects, sans jamais en épuiser le sens.
Pour continuer notre méditation, nous pourrons relire ce que dit le Catéchisme de l’Église catholique : « Appelée dans les Évangiles « la mère de Jésus » (Jn 2, 1 ; 19, 25 ; cf. Mt 13, 55), Marie est acclamée, sous l’impulsion de l’Esprit, dès avant la naissance de son fils, comme « la mère de mon Seigneur » (à la Visitation, Lc 1, 43). En effet, Celui qu’elle a conçu comme homme du Saint-Esprit et qui est devenu vraiment son Fils selon la chair n’est autre que le Fils éternel du Père, la deuxième Personne de la Sainte Trinité. L’Église confesse que Marie est vraiment Mère de Dieu (Theotokos) (cf. DS 251). »
Le résumé du même Catéchisme (n° 95) le dit plus simplement : « Pourquoi Marie est-elle vraiment la Mère de Dieu ? – Marie est vraiment Mère de Dieu parce qu’elle est la Mère de Jésus (cf. Jn 2, 1 ; 19, 25). En effet, celui qui a été conçu par l’opération du Saint-Esprit et qui est devenu vraiment son Fils est le Fils éternel du Père. Il est lui-même Dieu. »
Sainte Marie, Mère de Dieu, intercède pour nous, afin que nous devenions, par la grâce, frères de ton Fils ; ainsi nous pourrons t’invoquer tout au long de cette année : Sainte Marie, Mère de Dieu et notre mère, intercède pour nous.