6 avril 2020 -- lundi de la Semaine Sainte
Isaïe, 42, 1-7 ; Jean 12, 1-11
Homélie
Ce récit de l’Évangile de saint Jean est très semblable à un récit que Matthieu et Marc placent tout de suite avant celui de la Passion. L’Évangile de Jean a certainement été écrit longtemps après celui des Synoptiques, mais il doit rapporter avec justesse un événement qu’on racontait dans les Églises qui étaient sous l’influence de Jean. Les amis intimes de Jésus, en particulier Marthe, Marie et Lazare, sont si importants dans l’Évangile de Jean, que celui-ci n’aurait pas pu inventer ce récit ni même l’arranger pour mettre Marthe, Marie et Lazare au cœur du récit.
Cela ne fait que faire ressortir davantage le message du récit de Marc et Matthieu. Ceux-ci n’ont pas déformé le récit. Ils l’ont simplement dépouillé des mentions concrètes de lieu et de personnes pour que le message soit plus universel. En Jean, c’est chez Marthe, Marie et Lazare que la scène se passe. En Marc et Matthieu, c’est tout simplement à Béthanie ; et la femme n’est pas nommée ; elle est une figure universelle. En Jean, il s’agit bien de Marie, sœur de Lazare. Marc et Matthieu font oindre la tête de Jésus, pour manifester sa royauté. En Jean, Marie verse le parfum sur les pieds de Jésus, et les essuie avec ses cheveux, dans un geste débordant d’affection. En Marc et Matthieu, certains protestaient contre ce gaspillage ; en Jean, c’est Judas qui proteste et Jean explique que c’est parce qu’il était voleur, et n’avait pas souci des pauvres.
L’essentiel du message est le même : « Des pauvres vous en aurez toujours avec vous » et vous devrez toujours venir à leur secours. Moi, vous ne m’aurez pas sans cesse. Ainsi il annonce qu’il s’en va. Il annonce sa mort. Or, sa présence, au lieu même où il avait ressuscité Lazare peu auparavant, attire les foules ; et les grands prêtres, dans leur folie, décident de faire mourir aussi Lazare. Il y a là encore un autre message : Le disciple n’est pas plus grand que son maître. Ce que l’on a fait au maître on pourra aussi le faire au disciple. Celui qui veut être mon disciple, dit Jésus, qu’il porte sa croix et qu’il me suive. Porter sa croix n’est pas une simple figure de style. Si l’on porte sa croix c’est pour y être crucifié.
Armand Veilleux