26 juillet 2020 --- 17ème dimanche ordinaire "A"
1 Rois 3,5.7-12; Rom 8,28-30; Matt 13, 44-52
Homélie
J’ai eu l’occasion un jour de causer avec un grand penseur, qui n’avait pas la foi chrétienne, et qui se définissait très humblement non pas comme un athée, mais comme un « agnostique en recherche ». Et, dans une autre circonstance, un de mes amis qui n’avait pas – ou en tout cas pensait ne pas avoir – la foi, et qui se trouvait soudain confronté avec une maladie grave, probablement en phase terminale, qu’il vivait d’ailleurs avec un grand courage et une grande dignité, m’écrivait: « cela m’aiderait d’avoir ta foi ». Ces deux exemples – et je suis sûr que chacun de vous pourriez en citer plus d’un, nous permettent de voir comment le cheminement vers le Règne de Dieu et vers le bonheur est différent d’une personne à l’autre. Les trois paraboles que nous venons d’entendre soulignent aussi ce même mystère du cheminement absolument unique de chaque personne.
L’homme de la première parabole, celui qui découvre un trésor dans un champ, ne cherchait pas de trésor. Il tombe tout simplement dessus, comme par hasard. L’auteur de la parabole ne se soucie même pas d’expliquer dans quelle circonstance il a fait cette découverte. Cela importe peu. Ce qui importe c’est qu’il a eu la sagesse de percevoir la valeur de ce qu’il venait de découvrir comme par accident. Il comprend aussi que ce n’est vraiment pas par hasard qu’il a fait cette découverte et que ce trésor lui était en quelque sorte destiné. Il le cache donc à nouveau. Ce trésor fait partie prenante d’un champ, d’une réalité plus grande que le trésor lui-même. Il ne viendra pas enlever le trésor de nuit – ce qu’il pourrait sans doute faire sans que personne ne s’en rende compte – mais il achètera plutôt le champ et prendra donc légitimement possession de son trésor. Pour cela il vendra toutes ses autres possessions, ayant discerné que le marché en valait la peine. Le trésor de l’Évangile se trouve concrètement dans un champ que nous pourrions interpréter comme une image de l’Église avec toutes ses structures. Le champ n’est pas le trésor ; mais l’un est dans l’autre et ils sont inséparables.
Tout différent est l’homme de la deuxième parabole. C’est un chercheur, et même un connaisseur. C’est un négociant de perles fines et bien qu’il en ait déjà une bonne collection, il est toujours à la recherche de perles de plus grande qualité. Un jour il en trouve une d’une qualité tout à fait exceptionnelle. En bon connaisseur il juge qu’elle vaut à elle seule plus que tout ce qu’il possède déjà. Lui aussi vend toutes ses possessions et achète cette perle rare qui comble toutes ses attentes.
L’homme de la troisième parabole est encore différent. C’est un pêcheur qui a lancé son filet à la mer et, comme toujours, il a ramassé un peu de tout : des choses utiles et des choses inutiles. Il met les bons poissons dans son panier et n’a aucune hésitation à renvoyer tout le reste à la mer.
Jésus, dans l’Évangile, nous parle souvent du renoncement. Ces trois paraboles nous aident à comprendre que le renoncement – à quoi que ce soit, même à tout ce que nous avons et tout ce que nous sommes – n’a de sens que s’il est la conséquence d’un choix judicieux et serein. C’est pour acheter un champ où se trouve le trésor que l’homme de la première parabole se défait de tout ce qu’il possède d’autre ; et c’est pour acheter la perle qui comble toutes ses recherches que le marchand de la deuxième parabole vent aussi tout ce qu’il a. Enfin le pêcheur de la troisième parabole est suffisamment comblé par le grand nombre de poissons de qualité pour ne pas hésiter à rejeter tout le reste à la mer. Tous les trois trouvent d’ailleurs leur joie et leur bonheur dans ce choix et cette détermination.
Peu importe comment nous avons découvert le trésor de l’Évangile, ce trésor nous comblera et sera le fondement de notre joie et de notre bonheur uniquement si nous avons le courage d’en payer le prix et de nous défaire de tout ce qui, dans notre vie, n’est pas compatible avec le message évangélique. Que nous soyons agriculteur, marchand de perles ou pêcheur, il nous faudra un jour ou l’autre savoir bien discerner et calculer la valeur de ce que nous venons de découvrir, de trouver ou de prendre au filet, par rapport à tout ce que nous possédons déjà.
Pour savoir faire les choix nécessaires au moment opportun, faisons comme Salomon dans la première lecture. Demandons à Dieu la sagesse, c’est-à-dire non pas une connaissance infuse de ce qu’il faut faire mais bien un cœur attentif et intelligent qui sache discerner et faire les choix nécessaires aux moments opportuns.
Armand VEILLEUX