28 décembre 2020 – Fête des Saints Innocents
1 Jean 1, 5 - 2, 2 ; Matthieu 2, 13-18
Homélie
L`Évangile de Matthieu, d’où est tiré le récit évangélique de la messe m’aujourd’hui, commence par les mots : « Livre des origines de Jésus-Christ, fils de David ». Dans le texte original grec le mot traduit par « origines » dans nos bibles en langue française est « genesis, genèse». Matthieu veut souligner par là le fait que la naissance de Jésus est une nouvelle genèse, un nouveau commencement, pour toute l’humanité.
Or, le livre de la Genèse commençait par la description de la création du monde. Au début, dans le chaos initial, tout était ténèbre, et le travail du premier jour de la création consista pour le Créateur à séparer la lumière des ténèbres. Dieu créa la lumière et Il vit que la lumière était bonne.
L’Évangéliste Jean voit aussi la naissance de Jésus comme une nouvelle genèse, et il n’est donc pas surprenant que tout son Évangile soit structurée comme une lutte continuelle entre le royaume des ténèbres et celui de la lumière, avec la victoire finale de la lumière du Christ ressuscité.
Ce même thème de la lumière et des ténèbres revient au début de la première Lettre de Jean, que nous venons d’entendre (première lecture) : « Dieu est lumière ; et, de ténèbres, il n’y a pas de trace en lui. » Et tout l’enseignement moral de Jean se résume en une seule phrase : marcher dans la lumière et non dans les ténèbres. Pour Jean, « marcher dans la lumière » et « être en communion avec Dieu » sont une seule et même chose ; c’est pourquoi celui qui prétend être en communion avec Dieu et marche dans les ténèbres est un menteur, comme le prince des ténèbres. Par ailleurs, dans un raccourci admirable, Jean identifie la communion à Dieu avec la communion aux autres : « Si nous marchons dans la lumière comme (Dieu) lui-même est dans la lumière, nous sommes en communion les uns avec les autres ».
Le récit évangélique de Matthieu que nous venons de lire nous montre que Jésus se retrouva, dès sa naissance au sein de la lutte entre le monde des ténèbres et celui de la lumière : Encore petit enfant, il connut dans sa chair les difficultés et les épreuves des pauvres et des opprimés, avec qui il s’identifiera durant toute sa vie. Combien de familles de nos jours comme tout au long des siècles sont disloquées par la guerre, les déplacements forcés de populations, l’exil. D’ailleurs la plupart des personnages qui apparaissent dans ce deuxième chapitre de l’Évangile de Matthieu, sont des figures emblématiques encore plus que des personnages historiques. Les « Mages » représentent une humanité inquiète et en recherche de salut, capable de reconnaître Dieu dans l’histoire et disposée à sortir d’elle-même et de sa sécurité pour aller à la rencontre de Dieu. Hérode et son fils Archélaüs représentent le pouvoir exploiteur et oppresseur, jaloux de son hégémonie et ayant peur de la perdre, prêt à toute cruauté pour défendre ses privilèges. Quant aux enfants de Bethléhem ils représentent tous ceux qui, à travers les âges jusqu’à nos jours, ont été victimes du pouvoir des ténèbres, à cause de leur appartenance au royaume de la lumière, qu’ils aient connu personnellement le Christ ou non.
Même si nous marchons dans la lumière cela ne veut pas dire que nous sommes nécessairement purs comme des anges. Au contraire, celui qui se croit sans péché se ment à lui-même et marche donc dans les ténèbres. Mais si nous nous reconnaissons pécheurs, nous avons, dit saint Jean, un défenseur auprès du Père. C’est de ce défenseur, dont nous célébrons en ces jours la naissance et qui est mort pour nous obtenir le pardon de nos péchés. C’est de lui que nous ferons mémoire en poursuivant notre célébration eucharistique.