11 avril 2021 - 2ème dimanche de Pâques

Ac 4, 32-35; 1 Jn 5, 1-6; Jn 20, 19-31

Homélie 

Les disciples, c'est-à-dire l'ensemble de ceux qui étaient demeurés fidèles à Jésus se trouvaient réunis le soir de Pâques. Leur nombre n'est pas précisé, mais ils ne devaient pas être très nombreux, puisqu'ils trouvaient place dans une maison dont ils pouvaient tenir les portes bien fermées, Ce sont des disciples clandestins car il fait déjà nuit et, comme Joseph d'Arimathée (19,38), ils ont peur des Juifs.  Ils ont reçu le témoignage de Marie-Madeleine qui est venue leur dire de la part de Jésus : "Je monte vers mon Père, qui est votre Père, vers mon Dieu, qui est votre Dieu".  Mais cela n'a pas suffi à les dégager de leur peur et à leur redonner la paix.

         

          La peur les a paralysés.  Ils n'ont pas le courage de parler publiquement.  Ils n'osent pas prendre parti pour leur maître injustement condamné.  C'est une situation semblable qu'avait connue le peuple d'Israël en Égypte acceptant par peur son propre esclavage.  C'est une situation semblable que nous connaissons de nos jours, quand la peur de la communauté internationale permet à une culture d'impunité de s'instaurer dans les relations entre les peuples où les plus forts oppriment impunément les plus démunis, souvent au mépris de toutes les règles du droit.

          Lorsque Jésus se manifeste au milieu des disciples réunis, il leur dit tout d'abord "La paix soit avec vous".  Ce n'est qu'après avoir reçu et assumé cette paix qu'ils seront dégagés de leur peur et qu'ils auront plus tard le courage de dire aux Juifs : "Dieu l’a fait Seigneur et Christ, ce Jésus que vous, vous avez crucifié." (Actes 2, 36).

          Ensuite, Jésus souffle sur eux.  Le verbe utilisé par Jean est le même qu'on retrouve en Genèse 2,7, lorsqu'il est raconté que Dieu insuffla son propre esprit dans les narines du premier homme pour en faire un être vivant.  Il s'agit d'une nouvelle création.  Jésus re-crée ses disciples à une vie nouvelle.

          Les paroles "recevez l'Esprit Saint.  Tout homme à qui vous remettrez ses péchés, ils lui seront remis; tout homme à qui vous maintiendrez ses péchés, ils lui seront maintenus," sont adressées à l'ensemble des disciples présents. C'est l'appel à se libérer mutuellement en se pardonnant les uns les autres.

          Pour l'Évangéliste Jean, cette dimension communautaire est capitale mais elle présuppose d'abord une démarche personnelle de foi.  Pas de communauté authentique sans une expérience personnelle de foi de la part de chacun des membres.  Aussi Jean introduit ici l'exemple de la démarche personnelle de Thomas -- Thomas qui n'est pas simplement l'incrédule d'un moment, mais aussi et avant tout le croyant par excellence, ayant été le plus courageux des disciples.  En effet, quand Jésus décida de monter en Judée pour voir son ami Lazare, au seuil de la mort, et quand les autres disciples voulaient l'en dissuader parce que les Juifs cherchaient à se saisir de lui, Thomas dit à ses compagnons:  "Allons nous aussi mourir avec lui." (Jean 11,8sq).

          Lorsque Jésus montra ses mains et son côté au groupe de disciples réunis, ceux-ci, dit l'Évangile. furent "remplis de joie en voyant le Seigneur", et lorsque Thomas qui était absent revint, ils lui dirent "Nous avons vu le Seigneur".  Ils étaient tout heureux d'avoir retrouvé le Jésus qu'ils croyaient avoir perdu.  Mais lorsque Thomas voit les mains et le côté de Jésus, il est le premier à faire l'acte de foi en la divinité du Christ ressuscité:  "Mon Seigneur et mon Dieu".  De tous les Évangiles c'est la confession la plus explicite en la divinité de Jésus.

          Cette foi sera communicative et transformera le groupe de disciples apeurés en communauté de croyants, n'ayant qu'un coeur et qu'une âme et témoignant de leur foi de façon très pratique comme nous le décrit la lecture des Actes des Apôtres que nous avons comme première lecture à la Messe d'aujourd'hui. Cette expérience s'est communiquée au-delà des âges et elle est parvenue jusqu'à nous.  C'est de nous tous que parle Jésus lorsqu'il dit "Bienheureux ceux qui croient sans avoir vu". 

Armand Veilleux