6 décembre 2021 – Lundi de la deuxième semaine de l’Avent
Isaïe 35, 1-10 ; Luc 5, 17-26
Homélie
Durant la plus grande partie de l’Année liturgique, nous avons une lecture à peu près suivie d’un des trois évangiles synoptiques, et la première lecture est choisie en fonction de cet Évangile. Or, durant le Temps de l’Avent (au moins la majeure partie) le lectionnaire nous fait parcourir rapidement le Livre d’Isaïe, choisissant au passage les plus belles prophéties messianiques ; et les évangiles de chaque jour sont choisis pour s’harmoniser avec cette lecture d’Isaïe.
Nous avons aujourd’hui l’une de ces belles prophéties d’Isaïe annonçant un Messie qui soulagera les malades et les miséreux : « Rendez fortes les mains fatiguées, rendez fermes les genoux chancelants... alors le boiteux bondira comme un cerf et la bouche du muet criera de joie... ». Pour exprimer comment cette prophétie a été réalisée en Jésus, nous avons le récit de la guérison du paralytique, dans la version de Luc.
On amène à Jésus un paralysé, quelqu’un qui, selon l’interprétation des docteurs de la loi et des scribes, est considéré comme un pécheur et est donc impur. Il est exclu de « la maison ». La porte lui est fermée par la foule des « gens bien » qui constituent le « peuple ». Il ne peut entrer ni par la porte ni par la fenêtre. Qu’à cela ne tienne. Les personnes qui l’ont amené, et qui n’ont donc pas craint de se rendre « impures » elles-mêmes en le transportant, le déposent devant Jésus en le faisant passer par un trou du toit.
Et puisque, aux yeux du judaïsme officiel, ce paralysé est nécessairement un pécheur, Jésus lui dit simplement « Tes péchés te sont remis » ; et, répondant aux réactions scandalisées des scribes, il ajoute que cela est aussi simple que de dire « prends ton brancard et marche ». Après cette guérison et cette libération, Jésus ne l’invite pas à le suivre, à devenir un de ses disciples. Il lui dit simplement « rentre chez-toi » ou mieux, littéralement, rentre « dans ta maison ». (N’oublions pas que ce miracle se produit aux confins d’Israël, dans la région de Capharnaüm, dans la « Galilée des Nations ».
J’attire votre attention sur deux mots de ce récit évangélique. Au début il est dit que les Scribes et les Pharisiens, venus de tous les villages de Galilée ainsi que de la Judée et Jérusalem, sont là assis, raisonnant dans leur cœur. et à la fin nous voyons le paralytique, guéri, se tenant debout devant eux. Ces Scribes, bien assis, représentent la partie bien installée de la Maison d’Israël, fermée au Prophète qui se manifeste en son sein, tout comme elle est fermée à tout ce qui est extérieur au peuple d’Israël.
Le paralytique guéri représente tous les pécheurs et aussi tous les païens que Jésus, après les avoir pardonnés, n’incorpore pas à la maison d’Israël, mais les renvoie chez-eux, dans « leur maison ». Alors que les Scribes restent bien assis dans leur conviction arrogante d’être les bons, les sauvés, jugeant et excluant tous les autres, ce paralytique se tient debout dans toute la dignité humble du pécheur qui se reconnaît « pécheur pardonné » ou « malade guéri ».
Nous avons tous, constamment, la tentation de nous tenir bien assis, jugeant facilement les autres. Cet Évangile nous invite à nous tenir debout, devant Dieu et devant les hommes, avec à la fois la dignité et l’humilité de la personne qui se sait à la fois pécheur et pardonné, malade et guéri par Dieu.
Armand Veilleux