4 décembre 2022 – 2ème dimanche de l’Avent « A »

Is. 11,1-10 ; Rom. 15,4-9 ; Mat. 3,1-12

H O M É L I E

          Le livre des Actes des Apôtres nous raconte l’histoire de Paul qui, trouvant à Éphèse un groupe de croyants leur demanda : « Avez-vous reçu l’Esprit Saint lorsque vous êtes devenus croyants ? » -- « Non » répondirent-ils, « nous n’avons même jamais entendu dire qu’il y avait un Esprit Saint ».  Alors Paul leur demanda : « Quel baptême avez-vous reçu ? » -- « Celui de Jean-Baptiste » répondirent-ils.  Alors Paul leur cita le message donné par Jean dans l’Évangile d’aujourd’hui : « Moi je vous baptise dans l’eau... Mais celui qui vient après moi... vous baptisera dans l’Esprit Saint et dans le feu. »

          Jean était un chercheur, un prophète à l’oeil perçant, regardant à la fois derrière et devant lui.  Un prophète – même le prototype du prophète.  C’est la raison pour laquelle il n’est pas mort dans son lit mais eut la tête tranchée.  La façon normale pour un prophète de mourir.  Il prêcha dans le désert.  Il n’alla pas prêcher dans les rues des villes, comme faisaient d’autres prophètes.  Il était l’esprit soufflant dans le désert.  Il obligeait ceux que son message attirait à venir au désert, loin de leurs occupations, de leurs maisons, de leurs champs.  Il les obligeait à se retrouver avec eux-mêmes, à considérer leur histoire, leur vie, depuis la perspective propre au désert.

          Au coeur de l’enseignement de Jean se trouve le message que Dieu vient.  Il y a quelqu’un qui vient après Jean.  « Celui qui vient après moi » : cette expression peut avoir plusieurs sens.  Le premier sens pourrait fort bien être que Jésus fut durant un certain temps l’un des disciples de Jean.  En effet « venir après quelqu’un » dans le langage de la Bible, veut dire être son disciple. Mais l’expression que Jésus « vient » est prégnante de plusieurs significations profondes.  Dieu est l’Emmanuel, le Dieu avec nous, présent dans notre vie de tous les jours, dans la vie quotidienne de tout être humain.

          Nous pouvons maintenant lire de nouveau la première lecture (du Livre d’Isaïe) et y voir le message que Dieu veut une humanité sans frontières, sans guerres, sans loups et serpents, sans hommes violents.  Il veut une humanité marquée par l’harmonie -- harmonie entre femmes et hommes, entre les humains et leur environnement ;  une humanité marquée par la justice, sans privilèges, sans pauvres opprimés, sans juges iniques ; une humanité où les nations ne seront plus séparées par les montagnes et les ravins de leurs religions, de leurs crédos politiques, de leurs systèmes théologiques ou philosophiques...

          Une utopie ? Bien sûr ! tout comme l’appel à être parfait comme notre Père céleste.  Une utopie à laquelle il vaut la peine de consacrer toute notre vie.  Un idéal et un but que nous ne pouvons atteindre que par une seule voie, celle de la conversion.  Et c’était ce que l’Esprit du désert, parlant par la bouche de Jean, exigeait de tous.  La conversion radicale que les Pharisiens et les Sadducéens n’étaient pas capables de réaliser, nous ne le pouvons pas plus qu’eux.  Nous avons besoin du baptême de feu : c’est-à-dire de l’action de l’Esprit, du vent brûlant du désert, consumant toutes les impuretés et les souillures de nos vies et de nos coeurs.

          La prophétie d’Isaïe brosse un tableau où le petit garçon conduit ensemble le loup et l’agneau, le léopard et le chevreau, le veau et le lionceau ; où la vache et l’ourse auront le même pâturage, le lion mangera avec le bœuf ; et où le nourrisson s’amusera sur le nid du cobra.  Oui ! le mouvement de l’histoire va dans cette direction.  Et cependant les journaux quotidiens nous rappellent que la violence, la soif du pouvoir et de l’argent sont toujours présents.  Tant de crimes quotidiens nous rappellent que tout le monde n’est pas encore rempli d’un esprit d’amour et de paix... Le sommes-nous ?

          L’appel à la conversion qui vient du souffle brûlant du désert, par la bouche de Jean le Baptiste, est un appel personnel adressé à chacun de nous.

          Puissions-nous l’entendre d’une façon spéciale en ce Temps de l’Avent.

Armand Veilleux