22 janvier 2023 -- Troisième dimanche ordinaire « A »
Is 8, 23b – 9, 3 ; 1 Co 1, 10-13.17 ; Mt 4, 12-23
H O M É L I E
Lorsque Pierre et son frère André, répondant à l’appel de Jésus, quittèrent tout et le suivirent, ils prenaient un énorme risque. De leur temps même, d’autres prophètes étaient venus, se présentant comme le Messie, et beaucoup les avaient suivis, simplement pour se rendre compte plus tard qu’ils avaient été induits en erreur et s’étaient trompés. D’une certaine façon, les Disciples eurent de la chance ! Celui qu’ils suivirent était le Messie.
Et ils furent si heureux d’avoir fait le bon choix que plus tard, se rappelant le moment de leur premier appel, ils l’embellirent. Chacun d’eux le rapporte à sa façon, décrivant un contexte différent. Ils tendent tous à donner l’impression que leur réponse fut immédiate et définitive. En réalité nous savons par le reste de l’Évangile, qu’ils hésitèrent considérablement et qu’ils n’abandonnèrent leurs occupations qu’après la Résurrection. Mais en télescopant ainsi les événements en un seul épisode, ils soulignent le point essentiel, qui est le pouvoir qu’a l’appel de Dieu, une fois qu’il a été reconnu et accepté, de mobiliser toutes les énergies humaines.
La façon dont Jésus appela ses disciples est caractéristique du nouveau style adopté par le jeune rabbin Jésus. Il ne réunit pas ses disciples autour de lui à la façon des rabbins contemporains et des directeurs d’écoles. Il ne sera pas un professeur trônant sur sa chaire, avec une foule fervente de disciples à ses pieds. Il sera un rabbin itinérant, voyageant constamment vers les pauvres et les égarés. Ce qu’il demandera a ses disciples ne sera pas des oreilles bienveillantes ou un regard enthousiaste, mais plutôt la volonté de se mettre sur les routes et d’aller au-devant des autres, le courage de rencontrer l’autre là où elle est ou là où il est, aux frontières les plus éloignées. L’Évangélisation ne sera pas l’affaire de cercles clos réunis dans un ensemble commun de croyances autour du même maître. Elle consistera à sortir de soi-même vers la rencontre de l’autre. Vers les périphéries, dirait le pape François.
Il est important d’entendre ce message durant la Semaine de Prière pour l’Unité des Chrétiens. Nous avons trop facilement tendance à identifier l’Église avec le Royaume de Dieu. Dans l’Évangile, Jésus fait une distinction très claire entre les deux. Tout être humain, sans aucune distinction, est appelé à entrer dans le Royaume de Dieu. Mais seul un petit nombre est appelé à être, face au reste du monde, Ses témoins et les témoins de Son Message. Ils sont l’Église. Et la mission de l’Église n’est pas de se soucier du nombre de ses membres, ou de se préoccuper de ce que tous joignent ses rangs. La mission de l’Église est d’aider tout être humain à entrer dans le Royaume de Dieu. L’Église restera probablement toujours petite. Le Royaume de Dieu, au service duquel elle est, doit être universel.
Si nous nous souvenons de cela, tous les problèmes internes de l’Église prennent une importance beaucoup plus relative. Les conflits, qui sont normaux et sains dans tout groupe humain en santé, existèrent dès les origines. Les Corinthiens disaient : j’appartiens à Pierre ou j’appartiens à Paul ; comme certains disent de nos jours : j’appartiens à l’Église traditionnelle ou à l’Église progressiste, au mouvement charismatique ou au mouvement « Nous sommes l’Église ». Paul leur dit – et nous dit : « Ne soyez pas stupides ! Avez-vous été baptisés au nom de Paul ou de Pierre ? Est-ce que Paul ou Pierre sont morts pour vous ? »
Le Christ est celui qui est mort pour nous, et nous formons une Église non pas en vue de nous occuper de nos problèmes internes, mais afin de témoigner ensemble du même Royaume de Dieu, quels que soient nos conflits.
Le filet dans lequel il nous faut rassembler l’humanité ne consiste pas en nos propres rangs. C’est le filet mystérieux de l’amour miséricordieux de Dieu pour toute personne, quels que soient sa couleur, sa race ou ses croyances.