25 novembre 2023 – samedi de la 33ème semaine
H o m é l i e
Chers frères et sœurs,
Lorsque nous essayons de nous représenter ce que sera la vie après notre mort physique, nous ne pouvons le faire qu’en utilisant des images qui correspondent à notre vie ici sur la terre. C’est d’ailleurs ce que fait l’Écriture, aussi bien de l’Ancien que du Nouveau Testament. C’est même ce que fait Jésus, dans ses paraboles, où il nous décrit soit le bonheur éternel auprès de Dieu, soit le malheur éternel si nous n’avons pas vécu ici-bas dans l’amour.
Nous ne pouvons évidemment nous imaginer l’au-delà qu’en utilisant des images. Et les seules images dont nous disposons sont celles qui correspondent à nos sens : ce que nous pouvons voir, entendre, toucher, sentir. Il n’y a rien de mal à utiliser toutes les images dont nous disposons pour nous représenter la vie dans l’au-delà. Mais l’important est de ne pas oublier que la réalité est tout autre et infiniment plus belle que tout ce que nous pouvons exprimer à travers ces images.
Au temps de Jésus, il y avait, parmi les docteurs en Israël, deux grandes écoles de pensée, celle des Pharisiens, qui croyaient à la résurrection des morts, c’est-à-dire à une vie dans l’au-delà, après notre mort physique, et l’école des Sadducéens, qui n’y croyaient pas. Ce sont eux qui, dans le texte d’Evangile que nous venons de lire, essayent de prendre Jésus au piège, en imaginant une histoire assez invraisemblable d’une femme qui aurait eu sept maris l’un après l’autre et ils demandent à Jésus de qui elle sera la femme dans le ciel.
La réponse de Jésus est qu’ils n’ont rien compris. Ils s’imaginent la vie dans l’au-delà comme la continuation de la vie physique d’ici-bas. Ce sera tout autre chose. Ici-bas, notre vie est soumise aux limites du temps et des l’espace. Nous vivons toujours dans un moment précis et dans un lieu déterminé. Dieu, dont nous partagerons l’existence, est au-delà de ces limites. Notre relation avec Dieu consiste tout entière dans le fait d’être une relation – une relation d’amour. Jésus cite une parole adressée à Moïse, où Dieu se présente à lui comme le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. Ceux-ci n’ont pas vécu au même moment. Si Dieu « est » – et non pas « a été » – le Dieu de chacun d’entre eux, c’est qu’ils sont tous vivants, même après les quelques années qu’ils ont vécu sur terre. Il n’est pas le Dieu des morts. Il est le Dieu des vivants. S’il est le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. Il est donc aussi et demeurera toujours le Dieu de chacun d’entre nous.
Et cela doit nous rendre conscients de quelque chose de semblable concernant toutes les vérités de la foi. Dieu est plus grand – infiniment plus grand que tout ce qu’on peut en dire, en penser, en sentir. Toutes les images et les formules que nous utilisons pour parler de Dieu et des choses divines, y compris les définitions dogmatiques les plus importantes, ne sont que de faibles approximations d’une Réalité infiniment plus grande et plus belle que tout ce qu’on peut en dire ou en penser. Cela doit nous rendre très humble à l’égard de toutes nos connaissances et nos expériences des choses divines et nous rendre compréhensifs à l’égard des autres personnes qui peuvent exprimer les mêmes réalités dans des formules tout autres que les nôtres, même si elles nous semblent logiquement contradictoires. L’unique chose qui vaut, en fin de compte, est notre relation à Dieu, une relation qui est amour – l’unique forme de connaissance véritable de Dieu.
Armand Veilleux