C 33 LUC 21, 05-19 (14) Chimay :

13.11.2022

Frères et sœurs, aujourd’hui est l’avant dernier dimanche de l’année liturgique. La Parole de Dieu nous annonce le basculement vers un monde nouveau. L’arrogance et l’impiété n’y auront plus leur place. Le mal n’aura pas le dernier mot. Le jour du Seigneur viendra comme un Soleil de justice qui apportera la guérison de toutes les injustices de notre monde.

Vers 470 avant J.C., voilà une cinquantaine d’années que le peuple d’Israël est revenu d’exil dans l’enthousiasme. Depuis, l’enthousiasme a laissé place à la désillusion. La crise politique, économique et sociale qui sévit se double d’une crise morale et spirituelle. Comme quoi les temps ne changent pas. Certains mettent en doute l’amour et la fidélité de Dieu. Alors, le prophète Malachie (3,19-20), dans le langage imagé des apocalypses, appelle ses frères à ne pas douter de l’avenir et à avoir le courage de l’espérance : Dieu viendra comme un feu qui brûlera les infidèles et illuminera ceux qui lui ont conservé leur foi, qui auront persévéré jusqu’à la fin (Mt 24,13).

Le prophète Malachie nous rappelle que Dieu est juste. Son projet d’instaurer la justice progresse irrésistiblement. Les croyants ne doivent pas désespérer mais attendre impatiemment sa venue. Le prophète précise que ce jour sera « brûlant comme une fournaise » (Ml 3,19). C’est une manière de dire l’amour passionné de Dieu pour l’humanité.

Même appel à l’espérance et à la persévérance que Jésus adresse à ses disciples, dans un discours sur la fin des temps. Ce discours en forme d’apocalypse s’adresse, en réalité, à toutes les générations chrétiennes. La destruction du Temple marquera la fin d’un monde ; elle ne marquera pas pour autant la fin du monde. Avant que n’arrive le jour du Seigneur, les disciples de Jésus devront affronter les tempêtes de l’histoire et, à l’exemple de leur maître, connaître la persécution. Mais, quoi qu’il arrive, qu’ils ne soient pas effrayés ; ils sont assurés de sa présence. Cela nous amènera à rendre témoignage.

À la lecture de l’Évangile, nous avons entendu parler de catastrophes : il y aura la ruine de Jérusalem, des guerres, des famines, des persécutions. Ces événements sont toujours d’actualité : tous les jours, nous entendons des propagandes et des informations qui nous fragilisent ; l’arrogance, la violence et les divisions sont une réelle menace pour notre planète, nos pays et nos familles.

Mais aujourd’hui le Seigneur nous recommande de ne pas nous laisser décourager par les prophètes de malheur. Il ne faut pas le chercher dans ce qui dramatise l’histoire. Rien ne saurait nous séparer de l’amour de Dieu (Rm 8,39). Quand tout va mal, il est là, au cœur de nos vies. Vous connaissez le chant de Raymond Fau : Tu es là au cœur de nos vies / Et c’est toi qui nous fais vivre / Tu es là au cœur de nos vies / Bien vivant, ô Jésus-Christ. / Dans le secret de nos tendresses / Tu es là. / Dans les matins de nos promesses / Tu es là.

Le Seigneur est celui qui vient nous redonner force et courage pour travailler ensemble à la construction d’un monde plus juste et plus fraternel. C’est auprès de lui que nous venons puiser pour remplir cette mission. En ce jour, nous pensons à tous les bénévoles qui donnent le meilleur d’eux-mêmes pour aller à la rencontre des pauvres et des exclus. Ils sont de plus en plus nombreux ceux et celles qui souffrent de la solitude. Le Seigneur voit cette détresse ; il nous envoie pour organiser la solidarité et le partage.

C’est aussi cet appel que nous trouvons dans l’épitre de saint Paul (2Th 3,7-12). Paul, lui aussi, appelle les chrétiens de Thessalonique à l’espérance et à la persévérance. Il adresse une mise en garde à ceux d’entre eux qui, convaincus de la proximité du jour du Seigneur, sont tentés de se laisser vivre. À ceux que l’espoir d’un retour imminent du Christ conduit à vivre désœuvrés, l’apôtre rappelle que, lui, il travaille de ses mains. Il vient nous ramener au « travail ». Il ne s’agit pas seulement du travail salarié, mais aussi de tout ce qui relève de notre responsabilité de chrétien. Loin de les détourner des réalités quotidiennes, leur espérance doit les éveiller à leurs responsabilités. Qu’ils prennent Paul pour modèle, lui qui a travaillé pour n’être en charge de personne.

Un jour, Jésus recommandait à ses disciples de rester « en tenue de service » (Lc 12,35). Notre mission est de collaborer, par toute notre vie, au salut du monde. Cette mission ne sera pas facile. Jésus avertit les siens qu’ils seront détestés de tous. Mais nous ne devons pas avoir peur ; le Seigneur ne nous abandonnera jamais. L’histoire entre Pâques et le retour du Christ est le temps de l’Église, chargée de porter témoignage avec persévérance, malgré les persécutions.

Les lectures bibliques de ce dimanche visent donc à réveiller notre foi. Trop souvent, nous ne voyons que ce qui va mal. On se lamente mais on ne bouge pas. Le Christ nous invite aujourd’hui à vivre une vie digne de l’alliance dans laquelle nous sommes engagés. Quand nous regardons vers la croix, nous comprenons qu’il s’est donné entièrement et jusqu’au bout. Il n’a fui ni ses responsabilités ni le mal.

Notre réponse ne serait-elle pas d’accueillir cet amour de Dieu pour nous et d’en vivre. C’est ce que nous rappelle constamment l’Évangile : les petits, les pauvres, les exclus ont la première place dans le cœur de Dieu. Le pape François nous propose d’oser des actes qui rendent visible cet amour de Dieu. « Les pauvres ont besoin de nos mains pour se relever, de nos cœurs pour ressentir à nouveau la chaleur de l’affection, de notre présence pour vaincre la solitude. Ils ont simplement besoin d’amour » (Homélie du 17.11.2019). 

C’est sur cette route que nous sommes invités à le suivre. Les épreuves seront au rendez-vous. Mais ceux qui les endureront au nom du Christ seront sauvés. C’est là que le Christ nous attend pour témoigner de l’espérance qui nous anime. « Pas un cheveu de votre tête ne sera perdu. C’est par votre persévérance que vous garderez votre vie » (Lc 21,19). Inutile de chercher les mots : Le Seigneur lui-même s’en charge. Et là, nous en avons de nombreux exemples : Bernadette de Lourdes qui était la plus ignorante de sa ville a eu des réponses extraordinaires devant les policiers qui l’interrogeaient. Si Jésus nous envoie son Esprit Saint, c’est pour que nous puissions témoigner de la foi et de l’espérance qui nous animent.

En ce dimanche, nous sommes venus vers le Seigneur. Nous voulons l’accueillir et lui donner la première place dans notre vie. C’est avec lui que nous pourrons travailler à la construction d’un monde plus humain. Oui, Seigneur, tu es là au cœur de nos vies. Pour toi, nous restons en éveil car « c’est un bonheur durable de servir constamment le créateur de tout bien » (prière d’ouverture). Élargis nos cœurs aux dimensions du tien. Que par notre prière, nos paroles et notre solidarité, nous soyons de vrais témoins de l’espérance qui nous anime. Amen