A PÂQUES 02 JEAN 20, 19-31 (16)
Chimay : 16.04.2023
Frères et sœurs, le temps pascal est une période de joie dans l’année liturgique, en même temps qu’une période féconde, puisque le Christ dans l’évangile de ce jour nous envoie en mission. Pourtant notre situation actuelle de chrétiens, dans une société souvent arc-boutée sur un dogmatisme laïc, devient de plus en plus minoritaire, elle ne ressemble en rien à la description idyllique qu’en font les Actes des Apôtres (2,42-47). Elle semble plus proche de la situation des premiers chrétiens auxquels Saint Pierre s’adresse (IPi 3,1-9). Comme eux, nous croyons au Christ sans l’avoir vu, contrairement à Thomas ; comme eux nous sommes dispersés dans un environnement pas toujours favorable, pour ne pas dire hostile. Aujourd’hui, laissons-nous réconforter par notre joie qui trouve sa raison d’être dans la résurrection du Christ.
Le texte des Actes des Apôtres nous donne le témoignage de l’Église primitive. Elle ne cesse de s’agrandir dans la force de l’Esprit Saint. Par la bouche des premiers chrétiens, le Christ annonce la bonne nouvelle. Comme eux, nous sommes invités à appuyer notre vie chrétienne sur quatre piliers : 1. Fidélité à l’enseignement des apôtres pour approfondir notre foi et permettre à la bonne nouvelle de transformer notre vie de baptisés. 2. Fidélité à la communion fraternelle pouvant aller jusqu’au partage des biens. 3. Fidélité à la fraction du pain et donc à l’Eucharistie et à l’adoration. 4. Fidélité à la prière, soit à la maison, soit en communauté. Ces quatre fidélités sont nécessaires. C’est grâce à elles que nous pourrons donner le vrai témoignage de notre vie de chrétiens baptisés.
L’évangile de Saint Jean aujourd’hui, appelé celui de Saint Thomas l’incrédule, nous invite à la découverte de la miséricorde divine. C’était au soir du premier jour de la semaine, c’est-à-dire le dimanche soir, celui de Pâques évidemment. Les disciples avaient verrouillé les portes du lieu où ils étaient car ils avaient peur ; en raison du climat de haine et de violence qui régnait sur Jérusalem depuis la mort de Jésus ; ils craignaient pour leur sécurité avec raison, puisqu’ils avaient été disciples d’un rebelle, d’un « ennemi de César » (Jn 19,12). Cette peur, nous la connaissons bien : Dans certains pays, les chrétiens sont massacrés. Ailleurs, ils sont tournés en dérision, privés de tout droit. Nous vivons dans un monde imprégné par l’indifférence, l’incroyance ou la « mal croyance », c’est-à-dire que toutes les religions soient bonnes sans distinction. Or c’est dans ce monde tel qu’il est que nous sommes envoyés pour témoigner de notre foi en Jésus Christ.
Comme il l’a fait pour les apôtres, puis pour Thomas huit jours plus tard, le Seigneur ressuscité nous rejoint dans nos enfermements. Pour lui, toutes les barrières qui nous enferment, ça ne compte pas. Il est toujours là, et il ne demande qu’à nous rejoindre au cœur de nos vies et de nos déroutes. Il reste l’Emmanuel, « le Dieu avec nous » (Is 7,14). Nous avons vu que Thomas a eu beaucoup de mal à croire en cette bonne nouvelle. Pour lui, ce n’était pas possible. D’ailleurs il avait déjà démissionné et ne se tenait plus avec les autres apôtres. Il avait vu Jésus mort sur la croix et enfermé dans son tombeau. Il ne pouvait pas imaginer qu’il ressusciterait. Nous n’avons pas à sourire de son incrédulité. Si nous avions été à sa place, nous n’aurions probablement pas fait mieux. Pour beaucoup d’entre nous, pour croire, il faut voir.
Mais voilà que Jésus lui-même rejoint ses apôtres au cœur de leurs doutes et de leur détresse. La foi est un don de Dieu fondée sur une rencontre éminemment personnelle. Et c’est bien cette dernière qui fait basculer Thomas. La première parole de Jésus est un message de paix : « La paix soit avec vous ! » (Jn 20,21). Il déclare ainsi que lui-même est la paix. Car ceux auprès desquels il est présent bénéficient d’un esprit parfaitement apaisé. Cette paix, c’est la joie retrouvée, c’est la miséricorde accordée et le pardon reçu, c’est aussi la réconciliation avec Dieu et avec soi-même. Au moment de les envoyer en mission, Jésus veut libérer ses disciples de cette angoisse et de cette peur qui les obsèdent. Il veut leur redonner force et courage car ils auront une longue route à parcourir. Ils seront envoyés pour annoncer au monde entier que tous sont appelés à se convertir à Jésus Christ et à accueillir la miséricorde. Un programme universel pour une équipe encore timide, dont la seule force sera la foi et l’Esprit Saint.
Nous chrétiens d’aujourd’hui, nous sommes les héritiers de ce témoignage des apôtres et nous sommes envoyés, nous aussi, pour le communiquer autour de nous, dans nos familles, nos lieux de travail et nos divers milieux de vie. Notre foi n’est vraiment vivante que si elle rayonne. Pas nécessairement en paroles, mais en vie chrétienne concrète. Le Seigneur nous attend dans notre monde, à l’endroit où il nous a placés pour que nous portions du fruit. Il aime réaliser des merveilles dans notre vie ordinaire et rien ne peut nous séparer de son amour.
L’Église née de la Pentecôte est un Évangile vivant qui devient contagieux pour ceux et celles qui la voient vivre. Chaque dimanche, le même Seigneur ressuscité rejoint les communautés rassemblées en son nom pour l’Eucharistie. Rien ne peut nous empêcher d’aller « puiser à la Source » de celui qui est l’Amour. Qu’il soit avec nous pour que nous soyons plus courageux dans notre témoignage. Qu’il nous garde plus généreux dans la pratique de la charité fraternelle. « Toi qui es Lumière, toi qui es l’amour, mets en nos ténèbres ton Esprit d’amour ». Amen.