C PÂQUES 04 JEAN 10,27-30 (17)


bon pasteurFrères et sœurs, en ce dimanche, le Christ se présente à nous comme le « berger de toute humanité ». Cette bonne nouvelle ne concerne pas que les croyants fidèles. Elle est pour tous les hommes et femmes du monde entier.

Dieu n’est pas le grand horloger. Les philosophes et les scientifiques des Lumières étaient fascinés par la Raison. En contemplant l’univers ils y ont vu la logique et ils ont donc comparé Dieu à un horloger. Il avait créé un univers type Rolex et depuis il se contenterait de laisser sa création tourner. Les lois parfaites et implacables de la physique l’avaient libéré de tout souci et il n’avait plus rien à faire pour sa création. Cette notion déiste ne révèle pas le Dieu que nous adorons. Notre Dieu est toujours présent, toujours attentif à chacun de ses enfants. Son amour pour nous est d’une intimité et d’une intensité infinie. Il nous protège et nous rassure car « personne ne peut rien arracher de la main du Père » (Jn 10,28).

Ce père affectueux a un fils qui est la réflexion parfaite de son être : « Le Père et moi, nous sommes UN » (Jn 10,30). Le fils est un berger, dont l’amour, comme celui du père, est intense et personnel : « Je connais mes brebis » (Jn 10,27). Les considérations humaines ne font pas justice à la réalité divine. Un berger humain, après tout, aurait du mal à considérer ses moutons comme des personnes. Quand il les regarde, il voit un troupeau. Mais Jésus est le Berger et il est différent de n’importe quel berger humain, tout comme son père est le Créateur et il ne ressemble à aucun horloger humain. Pour Jésus, chaque brebis est une personne, aimée d’un amour unique et personnel. Quand nous nous mettons en présence du Christ, nous n’avons pas besoin de porter un badge d’identité. Il connaît notre nom !

Si Jésus est le Berger différent de tout autre berger, nous devrions être des brebis bien différentes de ce charmant animal couvert de laine. Leur ardeur pour la prochaine touffe d’herbe fraîche est telle que la voix du berger suffit à peine pour les maintenir dans la sécurité du troupeau. Les aboiements des chiens sont un élément essentiel à la survie du troupeau. Mais les brebis du Christ n’ont pas besoin de ce genre de coercition. Dans la prière nous « entendons sa voix » (Jn 10,27). Dans notre âme, nous ressentons la bienveillance du Berger, nous sommes témoins de ses nombreux dons.

La lecture des Actes (Ac 13,14.43-52), entendue aujourd’hui, nous montre une communauté qui risquait de se replier sur elle-même. Paul et Barnabé, devant l’hostilité des juifs, ont compris que le Christ est la « Lumière des nations » (Lc 2,32 ; Jn 8,12) et le « Sauveur de tous les peuples » (Ps 66,3) ; ils décident donc d’annoncer l’Évangile aux païens, ce qui suscite la joie des païens, mais aussi la persécution : « (les juifs) se mirent à poursuivre Paul et Barnabé, et les expulsèrent de leur territoire » (Ac 13,50).

Dans le livre de l’Apocalypse (Ap 7,9.14-17), les pasteurs ne sont pas évoqués. Mais ils font partie de cette foule immense dont nous parle le texte. Nous y découvrons que même dans les pires catastrophes, le mal n’aura pas le dernier mot. Jésus nous est présenté comme « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » (Jn 1,29). Et ce qui est formidable c’est qu’il veut nous associer tous à sa victoire. Saint Jean nous parle d’une foule de toutes races et de toutes nations : peuple immense de ceux qui ont traversé l’épreuve et que le Christ pasteur conduit vers la source de vie. Après les persécutions, les souffrances, la faim et les pleurs, ils connaissent la joie d’être avec Dieu.

Dans l’évangile de ce jour, Jésus se présente à nous comme le « bon berger » qui connaît parfaitement chacune de ses brebis. Une précision s’impose précisément sur le sens du verbe connaître : dans le monde de la Bible, cela ne signifie pas que l’on a des renseignements sur la personne (son nom, son âge, son numéro national, le lieu où elle habite…). Quand Jésus nous dit qu’il connaît ses brebis, cela signifie qu’il les aime. Il voit les points faibles de chacune et il prend soin d’elles. Son amour est tellement immense qu’il va jusqu’à donner sa vie pour elles.

Devant tant d’amour, nous nous sentons bien misérables. Nous entendons les paroles du Seigneur, mais nous découvrons que nous ne connaissons pas vraiment le Seigneur. Les moyens de formation sur la Bible sont de plus en plus à la portée de tous. Et pourtant, nous sommes dans un monde où l’ignorance religieuse est de plus en plus grande. Les propos du pape sont passés à la loupe et tournés en dérision par des médias totalement étrangers à la foi. A travers lui, c’est le Christ qui est rejeté. C’est sa parole qu’on refuse d’entendre. Pour l’Église, l’important ce n’est pas de faire croire mais de témoigner de cet amour passionné du Christ, qui dépasse tout ce que nous pouvons imaginer. « Mes brebis écoutent ma voix » (Jn 10,27). Cet appel à écouter le Seigneur, nous le retrouvons tout au long de la Bible. Le Christ a repris cet appel : « Heureux ceux qui écoutent la Parole de Dieu » (Lc 11,28). Alors oui, nous pouvons demander au Seigneur qu’il nous apprenne à écouter son message d’amour pour qu’il imprègne vraiment toute notre vie.

C’est en écoutant la voix du Seigneur que nous apprendrons à mieux le “connaître”. Ce verbe, nous devons le comprendre au sens de “naître avec”. Pour cela, il nous faut le fréquenter, lui donner du temps, vivre avec lui. C’est ainsi que Jésus est venu vivre avec les hommes. Il s’est fait l’un de nous, en tout semblable à ses frères hormis le péché. En lui c’est Dieu qui se fait proche des hommes. Il partage notre vie parce qu’il nous aime. Nous le connaîtrons vraiment quand nous accepterons d’être pris dans son courant d’amour.

Les brebis suivent leur berger. Suivre le Seigneur, c’est faire route avec lui. Nous pouvons lui faire confiance car il nous conduit sur le chemin de la vraie vie. C’est ce que Pierre a répondu un jour à Jésus : « Seigneur, vers qui pourrions-nous aller ? Tu as les paroles de la vie éternelle » (Jn 6,68).

Ce que Jésus veut nous offrir, c’est une vie de bonheur sans fin. Pensons au père du fils prodigue. Ce dernier demande sa part d’héritage. Il n’a pas compris que son Père avait prévu de tout lui donner. Alors n’hésitons pas à tout demander au Seigneur, la plénitude de son amour et de sa présence.

Cette journée de prière pour les vocations nous rappelle que le Christ veut nous associer tous à sa mission de « Berger de toute l’humanité ». Nous pensons aux prêtres, religieux et religieuses, aux catéchistes, aux animateurs des divers groupes mais aussi à tous les baptisés. Nous ne sommes pas chrétiens pour nous-mêmes, pour “sauver notre âme”, mais pour travailler avec le Christ qui veut sauver le monde. Personne ne doit rester sur la touche. Le Seigneur attend de nous que nous donnions le meilleur de nous-mêmes là où nous sommes.

En célébrant cette eucharistie, nous nous tournons vers Celui qui a échangé sa vie contre notre salut. Nous lui rendons grâce pour cette espérance et cette joie qui est en nous. Qu’il nous donne d’en être les porteurs et les messagers tout au long de notre vie.