C PÂQUES 05 JEAN 13,31-33a.34-35 (12)
Chimay : 18.05.2025
Frères et sœurs, au cœur du temps pascal, nous accueillons le comman-dement nouveau du Seigneur Jésus : nous aimer les uns les autres comme il nous aime. L’amour mutuel, c’est le signe de la résurrection du Christ que nous devons manifester, puisqu’il a donné sa vie par amour ; et c’est déjà le témoignage que les premières communautés apportaient aux païens : « Voyez comme ils s’aiment », disaient-ils. C’est un commandement qui résume toute sa vie : « Comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres » (Jn 13,34).
Dans l’Évangile d’aujourd’hui, Jésus s’adresse une dernière fois aux disciples avant sa mort. Un chef politique aurait désigné son successeur subtilement ou pas. Un propriétaire aurait distribué ses biens. L’héritage de Jésus porte uniquement sur la relation. « Comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres » (Jn 13,34). C’est un testament spirituel. Son testament se lit à l’ombre de la croix et à la lumière de la résurrection. Au Golgotha, Jésus a donné sa vie jusqu’au bout pour ses amis. Au matin de Pâques, son amour pour nous a définitivement triomphé de la mort.
Jésus, le Maître et Seigneur, s’est mis au rang de l’esclave pour laver les pieds de ses disciples. En agissant ainsi, il leur a donné l’exemple à suivre. Cet exemple doit aussi inspirer notre comportement. Il ne s’agit pas d’imiter servilement ce que Jésus a fait – comme de laver les pieds de tout le monde – mais de nous mettre au service de nos frères et sœurs. « Comme lui savoir dresser la table, comme lui nouer le tablier, se lever chaque jour et servir par amour comme lui » (Robert Lebel). Le mot important est « comme ».
Par ce commandement nouveau, Jésus souligne la valeur d’une vie donnée au « goutte à goutte », pour les autres, dans les activités de notre quotidien. Aimer revient à trouver sa joie dans la présence de l’autre. Et le service est l’accomplissement de cet amour. Celui qui sert ne se trompe pas d’amour. Son but n’est plus d’être aimé. Il ne se regarde plus lui-même. Il ne se contente plus d’aimer aimer. Il aime en actes et en vérité et glorifie le Seigneur à travers ceux que le Père lui confie.
Nous devenons capables d’aimer nos frères parce que Dieu nous aime. Il dépose en nous sa propre capacité d’aimer. Être baptisés, vivre en baptisés, c’est devenir capables d’aimer de plus en plus comme Dieu. Bien-sûr, nous savons bien qu’il y a le péché qui nous éloigne de cet amour. Mais par le sacrement du pardon et de l’eucharistie, nous repartons avec cette force d’aimer qui vient de Jésus et comme lui aime.
Cet Évangile vient nous rappeler notre mission. Il ne s’agit plus aujourd’hui de « laver les pieds », mais de faire taire les pleurs et les cris de ceux qui souffrent. C’est à nos gestes d’amour, de partage et de solidarité que nous serons reconnus comme disciples du Christ. Nous sommes envoyés pour annoncer au monde la bonté du Seigneur, sa tendresse et sa miséricorde. Il compte sur nous pour en être les messagers dans notre vie de tous les jours.
Le livre des Actes des Apôtres (Ac 14,21b-27) nous montre Paul et Barnabé qui ont travaillé avec ardeur à cette annonce de la Bonne Nouvelle. Paul porte le souci des communautés qu’il a fondées lors de ses voyages : Lystres, Iconium, Antioche, Pergé. Sans cesse, il revient les encourager devant les persécutions, redresser leurs erreurs et les organiser en choisissant des anciens pour les encadrer. « Ils désignèrent des Anciens pour chacune de leurs Églises et, après avoir prié et jeûné, ils confièrent au Seigneur ces hommes qui avaient mis leur foi en lui » (Ac14,23). Au cours de leur voyage missionnaire, Paul et Barnabé fondent et organisent de nouvelles communautés chrétiennes. Grâce à leur témoignage, la Bonne Nouvelle de l’Évangile se répand de plus en plus. Mais le plus important, c’est l’action de Dieu dans ces communautés. La mission est d’abord son œuvre. Mais tout s’est fait « avec eux, et comment il avait ouvert aux nations la porte de la foi » (Ac 14,27).
La seconde lecture est tirée de l’apocalypse de Saint Jean (Ap 21,1-5a). C’est un message très fort et très solennel qui annonce un ciel nouveau et une terre nouvelle. C’est la victoire de l’amour sur toutes les puissances du mal. Le privilège d’être avec Dieu est pour tous. « Ils seront son peuple… Dieu sera leur Dieu » (Ap 21,3). Et nous saurons que la vraie demeure de Dieu, celle qui a toujours été la sienne, c’est l’homme, ce sont les hommes dont Jésus Christ s’est fait le frère, lui l’Emmanuel, c’est-à-dire : Dieu avec nous.
Voilà cette Bonne Nouvelle que nous entendons en ce dimanche. Ce qui fait la valeur d’une vie c’est un amour de plus en plus à la ressemblance de celui de Jésus pour nous.
En lisant les Évangiles, nous découvrons à quel point Jésus ne fait pas de différence ; il englobe toutes les catégories sociales ; il aime les pharisiens et les publicains, les prostituées et les femmes pieuses, les enfants et les adultes, les étrangers et les Juifs, les soldats et les lépreux. La Bonne Nouvelle de l’Évangile est pour tous sans exception.
Après cette première étape, il y en a une deuxième qui nous entraîne plus loin ; c’est celle d’un amour qui ne juge personne ; Jésus accueille la Samaritaine, la femme adultère, les publicains et les pécheurs. En agissant ainsi, il va à l’encontre des règles sociales de l’époque. Les paroles du Jésus ne jugent pas ; elles ne font pas de reproche ; elles n’enferment pas le pécheur dans son passé. Sa mission est de guérir et « sauver ceux qui étaient perdus » (Lc 19,10).
On constate qu’à chaque génération des chrétiens, des êtres humains parmi les meilleurs, ont témoigné d’un amour universel, parfois jusqu’à en mourir, tels saint François d’Assise, saint Charles de Foucauld ou les bienheureux martyrs d’Algérie, saint Damien, Mère Teresa. La vie de Mère Teresa a marqué l’histoire de l’humanité. Cette humble femme, avec des moyens limités, a réussi à faire tourner les regards de millions d’êtres humains, simplement parce qu’elle avait choisi d’aimer chaque personne qu’elle rencontrait.
Dans le quotidien de notre vie ordinaire d’hommes et de femmes quelconques, nous pouvons témoigner d’un amour fait de tendresse et de compassion, de respect pour tous les êtres, quelles que soient leurs situations sociales, leurs provenances, leurs couleurs de peau ou de cheveux. Cet amour-là est exigeant, il suppose de dépasser nos préjugés, entretenus par la haine, la peur et la bêtise.
Pour vivre une telle exigence de l’amour, confions-nous au Christ Jésus. Nous savons bien que notre désir de sainteté inclut l’offrande de notre faiblesse et de nos pauvretés. Paul et Barnabé « confièrent au Seigneur ces hommes qui avaient mis leur foi en lui » (Ac 14,23). Notre mission commence par accepter de nous abandonner en Celui qui nous a tout donné. Il s’agit de se laisser aimer afin de pouvoir aimer à notre tour.