Homélies de Dom Armand Veilleux

1 juillet  2023 – samedi de la 12ème semaine du Temps Ordinaire

Gen 18,1-15; Mt 8, 5-17

H o m é l i e

          À partir d’aujourd’hui, les lectures d’Évangile pour la Messe fériale, nous présenterons une série de guérisons de Jésus au début de son ministère. Dans les chapitres 5-6-7, Matthieu avait regroupé plusieurs enseignements de Jésus, que nous avons écoutés au cours des deux dernières semaines.  Dans les deux chapitres suivants, il regroupe une dizaine de miracles.

          Mais, attention ; il faut remarquer que là où nous parlons facilement de miracles, l’Évangile parle simplement de "guérison".  Dans notre conception moderne un miracle est quelque chose qui ne s'explique pas dans le contexte de ce que nous concevons comme les lois de la nature.  Or, cette conception du miracle est moderne et tout à fait étrangère à l'homme et à la femme de la Bible.  Pour l'homme de la Bible, il n'y a pas de loi de la nature.  La nature est soumise tout entière à la volonté et à la toute-puissance de Dieu, qui y agit comme bon lui semble et quand il veut.  Pour l'homme de la Bible, il n'y a pas de miracle; il y a simplement des "mirabilia Dei", des "merveilles de Dieu", c'est-à-dire des actions plus éclatantes dans lesquelles Dieu manifeste sa toute puissance.  Et toutes les actions merveilleuses produites par Jésus ne sont pas d'abord des manifestations de toute-puissance, mais plutôt des manifestations de l'amour miséricordieux de Dieu envers les hommes, surtout les petits, les souffrants, les victimes des forces du mal.

          La première condition – et, finalement, la seule condition pour être gratifié d’une telle manifestation de l’amour de Dieu est la foi.  C’est cette foi que manifeste le centurion de l’armée romaine dont il est question dans la première guérison racontée dans le texte que nous venons de lire. Pour cet officier de l’armée romaine, Jésus n’a pas besoin de venir et de pratiquer quelques gestes ou quelques rites sur son enfant pour le guérir. Il n’a qu’à vouloir que cet enfant guérisse.  Il reconnait donc à Jésus une autorité absolue et donc divine sur tout l’univers. Et Jésus fait remarquer qu’il n’a pas trouvé une telle foi en Israël.  Il ne demande pas à cet étranger de se convertir au Judaïsme; il ne lui demande pas de tout abandonner et de le suivre.  Il lui dit simplement de rentrer chez lui. Et il lui annonce que sa foi sera efficace : « Que tout se passe pour toi selon ta foi ».  Et son fils est guéri à l’heure même.

          Dans les guérisons accomplies par Jésus, il y a en général un geste physique et une parole.  Mais parfois il n’y a que l’un ou l’autre.  Dans le cas de la guérison de la belle-mère de Pierre, Jésus ne dit rien.  Il la touche simplement de la main et la fièvre la quitte sur le champ.  Alors elle se lève.  Elle se met debout devant lui, ce qui est un signe de dignité.  Et elle se met à le servir, ce qui est l’essence de la vie chrétienne, à l’image de Jésus qui est venu pour servir.

          Ensuite il y a la rapide mention de plusieurs possédés qui sont présentés à Jésus et dont il expulse les démons simplement par une parole.

          Enfin, Matthieu termine cette introduction à la longue série de guérisons qui seront racontées dans les deux prochains chapitres de son Évangile, par la parole d’Isaïe, qui donne leur sens à toutes ces guérisons :  « Il a pris nos souffrances, il a porté nos maladies ».

          Au cours de cette Eucharistie, prions spécialement pour toutes les personnes que nous connaissons, qui sont affectées de souffrances et de maladies, pour que Jésus, d’une façon ou d’une autre, porte avec elles ces souffrances et ces maladies.

Armand Veilleux              

 

30 juin 2023 – vendredi de la 12ème semaine du Temps Ordinaire

Gen.17, 1…22; Mt 8, 1-4

H O M É L I E

          On ne sort jamais indemne d’une véritable rencontre.  On s’en trouve toujours transformé, au moins dans une certaine mesure, pour le meilleur ou pour le pire.

29 juin 2023– Solennité des saints Pierre et Paul

Actes 12,1-11; 2 Tim 4, 6...18; Mat 16, 13-19

Homélie

          Pierre et Paul sont les deux piliers de l’Église, et celle-ci les a toujours célébrés ensemble dans son culte. Et c’est pourquoi nous les célébrons aujourd’hui, en ce 29ème jour de juin. Il serait difficile de trouver deux hommes aussi différents l'un de l'autre. Et pourtant un même amour du Christ a animé leurs vies et tous les deux sont morts martyrs pour leur foi, à Rome, où deux statues monumentales rappellent leur mémoire sur la Place saint Pierre. Pierre représente les Douze que Jésus s'était choisis durant son ministère ici-bas alors que Paul est le prototype de tous ceux qui furent appelés par la suite à être ses témoins. 

28 juin 2023 – Mercredi de la 12ème semaine impaire

Gen 15,1-12.17-18a ; 23, 1-3 ;  Mt 7, 15-20

H O M É L I E

Dans ce bref enseignement à ses disciples, Jésus les6 met en garde contre les faux prophètes et les enseignements erronés.  Pour distinguer les bons des faux, il leur donne une règle facile : « C’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez »

27 juin 2023 Mardi, 12ème semaine "B

Gn 13, 2.5-18,Mt 7, 6.12-14

Homélie

Aujourd'hui, nous reprenons la lecture du Sermon sur la Montagne, commencée il y a environ une semaine.  Ce matin, nous avons trois enseignements isolés de ce Sermon.

26 juin 2023 - lundi de la 12e semaine Ord.

Gn 12, 1-9 ; Mt 7, 1-5

Homélie

           Le récit de la vocation d'Abraham, que nous avons entendu dans la première lecture, est un texte fondamental pour la spiritualité monastique.  Surtout, il est facile d'établir un parallèle entre le pèlerinage d'Abraham et la fondation de Cîteaux.  

           Le père d'Abraham est né à Ur, en Chaldée (Gn 11, 31) et s'est installé à Haran, beaucoup plus au nord.  Naître à Ur signifiait appartenir à la culture la plus développée de l'époque.  Cependant, ce développement et les conflits qu'il a engendrés, ont provoqué un important mouvement de migration vers le Nord au cours du 17ème siècle avant JC. Le père d'Abraham et sa famille avaient été emportés par ce mouvement migratoire et s'étaient installés à Haran, à 1 500 kilomètres au nord d'Ur.  C'était à la limite de la civilisation sumérienne à laquelle Ur appartenait.  Pour aller au-delà, il fallait changer de culture.

           Abraham fait alors partie d'une première génération d'immigrants à Haran.  Et nous savons qu'une première génération d'immigrants dans un nouveau pays a toujours besoin de stabilité et de sécurité pour pouvoir s'enraciner.  Or, Abraham reçoit de Dieu un appel à abandonner cette stabilité et cette sécurité et à s'aventurer au-delà des frontières de sa culture - un appel à se lancer dans un voyage vers l'inconnu, sans autre sécurité que la parole de Dieu.  Il a accepté cette parole et c'est pourquoi il est appelé le père de tous les croyants.  Il s'est "mis en route sans savoir où il allait" - dans la foi.

           Nos Pères cisterciens, Robert, Alberic et Etienne ont vécu cette pauvreté absolue de la foi, cette spiritualité de l'Exorde. La vie des premiers cisterciens était très pauvre, matériellement ; pourtant, il y avait une pauvreté bien plus radicale en quittant Molesme.  Ils avaient laissé non seulement une grande abbaye bien organisée, avec de riches protecteurs et de grandes propriétés terrestres, mais aussi - et surtout - ils avaient laissé la sécurité d'une forme de vie monastique respectable, reconnue et estimée par tous.  Ils partent vers des terres inconnues, regardant le nuage pour savoir où s'arrêter et planter leur tente.

           De nos jours, de nombreux monastères, surtout dans les jeunes Églises, vivent dans une grande insécurité matérielle. Il existe cependant une autre forme de pauvreté que de nombreuses communautés vivent et vivront probablement encore longtemps.  C'est la pauvreté que les cisterciens ont connue avant la venue de Bernard et de ses compagnons. C'est une pauvreté qui consiste à ne pas avoir un avenir clair et certain du point de vue humain - à être totalement entre les mains de Dieu.  C'est surtout le fait d'appartenir à un monachisme en évolution, dans une Eglise en évolution, dans une société qui cherche ses fondements.

           Vivre avec la conscience de cette vulnérabilité est probablement la principale forme de pauvreté que nous sommes appelés à vivre aujourd'hui.  Si nous la vivons dans la paix et la sérénité, elle sera probablement, si Dieu le veut, le point de départ d'une nouvelle vitalité pour toutes les maisons de notre Ordre.  Ce sera aussi une façon de vivre en solidarité avec les millions de personnes qui vivent aujourd'hui l'insécurité du chômage et de l'exil.

25 juin 2023  -- 12ème dimanche "A"

Jér 20,10-13; Rom 5,12-15; Mat. 10:26-33

Homélie

          Dans la dernière des béatitudes (Mt 5,10-12) Jésus avait déclaré bienheureux ceux qui sont persécutés pour la justice.  « Heureux êtes-vous, avait-il dit, lorsque l’on vous insulte, que l’on vous persécute et que l’on dit faussement contre vous toute sorte de mal à cause de moi. »  Et il ajoutait « C’est ainsi en effet qu’on a persécuté les prophètes qui vous ont précédés. »  Le passage d’Évangile que nous venons de lire commente en quelque sorte et explique cette béatitude