Mardi de la 17ème semaine "B" -- 30 juillet 2002

Jérémie 14:17-22; Matt 13, 35-43

H O M É L I E

Dans la littérature monastique primitive, spécialement dans la littérature pachômienne, on trouve une conception de la vie ascétique qui trouve sans doute son inspiration dans l'Évangile que nous venons de lire. Selon cette façon de voir, Dieu a semé en nous au moment de notre naissance, tous les fruits de l'Esprit. Il nous a en effet créés à son image et, selon la belle figure du Livre de la Genèse, il a mis en nous son propre Souffle de Vie. Mais l'Ennemi ou le Diable est toujours à l'affût pour arracher ces fruits de l'Esprit et semer à leur place les fruits du mal. Les fruits de l'Esprit, ce sont les vertus, et les fruits du mal, ce sont les vices.

Le monde dans lequel nous sommes ici-bas est le lieu où se déroule le grand combat eschatologique entre les Puissances de la Lumière et les Puissances des ténèbres, entre les forces de la Vie et celles de la Mort, entre le Bien et le Mal. Nous, les croyants, nous savons quel sera l'issu de ce combat dont le Christ a déjà obtenu la victoire; mais nous ne savons pas combien de temps tardera à venir la victoire définitive. C'est pourquoi lorsque les premiers moines s'enfonçaient dans les déserts d'Égypte, ce n'était pas pour y savourer une tranquille solitude, mais au contraire pour y combattre, avec le Christ, les forces du mal, afin de hâter la pleine réalisation de la Victoire du Christ sur le Mal.

Cette lutte est la nôtre, à chacun de nous. Notre coeur est aussi le champ de bataille entre les forces du mal et celles du bien. Ne nous surprenons pas si l'ivraie apparaît un peu partout dans nos coeurs – c'est-à-dire si apparaissent les tentations de toutes sortes, que ce soit d'orgueil, d'ambition, de colère, de sensualité. Aussi longtemps que nous ne permettons pas à l'Ennemi d'arracher de notre coeur le bon grain, c'est-à-dire les fruits de l'Esprit, c'est-à-dire aussi longtemps que nous ne cédons pas à ces tentations elles sont impuissantes contre nous.

Demandons au Seigneur la Sagesse pour savoir discerner le bon grain et en surveiller attentivement la croissance. Et laissons agir le Seigneur lorsqu'il veut travailler le champ de notre vie par des épreuves afin d'en rendre le sol plus fertile. Quant à l'ivraie, n'y portons même pas attention, car elle a besoin de notre attention pour prendre racine.

Le champ dont parle Jésus dans la Parabole, c'est le chant de notre coeur, c'est aussi celui de notre communauté, de l'Église, de la Société autour de nous. Ne soyons pas obsédés par l'ivraie ou ce que nous considérons comme tel. Gardons nos yeux fixés sur le Christ et sur les fruits de l'Esprit qu'il a semés en nous, surtout celui de la charité, dans lequel se retrouvent tous les autres.

Armand Veilleux